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Journal de la canicule Histoire de l'histoire parution poche le 15 mars 2017
Le Journal de la canicule existe depuis 2008 : ci-dessous, les notes d'écriture qui l'ont évoqué sous le nom de code JdV (Journal des voisins) qui a été son premier titre. "La semaine dernière, jai remis un manuscrit à mon éditeur. Je laissais entendre que javais eu une autre idée et que je nétais pas sûr de la concrétiser rapidement. Mais décidément, il ny a pas que mon cerveau qui nest jamais en repos, cest maladif. La crise de goutte (dencre) a eu lieu dés le week-end : déjà léquivalent de 40 pages, rédigées en cinq jours et cette impatience intarissable qui me taraude depuis, mempêche de réfléchir à autre chose. Si je continuais à cette cadence, le bouquin serait achevé en cinq ou six semaines, pour fin janvier. Pourtant le travail saccumule : le nourricier bien sûr, mais aussi les projets universitaires, les mises à jour de Feuilles de route, plein dautres choses aussi dans tout ce qui forme un quotidien pourtant serré. Le temps est finalement très élastique, comment ai-je fait pour trouver le temps de rédiger 40 pages, bâtir un personnage, lui inventer un univers tellement précis ? Cest presque une schizophrénie, un dédoublement, une protubérance du cerveau qui me pousse à construire cet univers romanesque, étrangement cohérent, extraordinairement intuitif.S'il savait, mon éditeur pourrait me prendre pour un fou parce que je sais bien que lorsque jirai le rencontrer pour parler de ce fameux bestiaire à peine remis la semaine précédente, JdV (J'aime donner des noms de code aux écrits en cours...) sera dans ma tête. Il nen saura rien, il continuera de me parler de ce qui constitue pour lui, ma dernière nouveauté alors quelle est déjà supplantée. Jai toujours constaté une étrange amnésie après la fin dun texte et sa remise à léditeur. Leffort incroyable quil faut que je fasse pour me persuader que cest bien moi qui ait écrit ces lignes et de quoi ça parlait déjà ? Cette fois-ci l'amnésie est de l'ordre du remplacement, comme un carreau à la pétanque : une boule chasse l'autre." (05/12/2008) "Le 5 décembre dernier, je notais dans cette même rubrique (maintenant en archives 2008) que javais commencé un nouveau texte avec 40 pages écrites en 1 semaine. Un mois plus tard, le machin au nom de code Jdv compte à peu près 130 pages en format de roman. Jen suis sans doute au deux tiers et, à ce rythme, le premier jet pourrait être terminé dici quelques semaines. Je suis toujours surpris de cette protubérance dinspiration qui pousse à intervalle régulier, sans crier gare, sans sannoncer outre mesure. Choses irraisonnées, quasi maladives mais sans douleur, plaisir fantaisiste au contraire, une addiction à lécriture, scories peut-être dune imagination trop fertile. Faut-il se soigner pour autant ? Non, je ne le pense pas, plutôt tenter dordonner tout ceci. Jai en projet de dresser la liste de tous ces textes inaboutis (en ce sens quil ne sont pas proposés à la publication, considérés comme textes transitoires ou quils auront été refusés) et les sauvegarder dune façon numérique plus efficace. Car Jdv fait partie de ces projets inaboutis : pas sûr que je le propose à ma maison dédition. Dailleurs jai déjà dautres projets qui fourmillent Lensemble manque de cohérence avec la ligne éditoriale dans laquelle on semble me pousser. Cette cohésion densemble ne me dérange pas du reste. Éditer est un travail commun et je me vois mal perturber « limage » que lon me colle avec une autre publication qui serait encore différente des précédentes. Ça fait un peu dispersé, touche à tout, peu crédible. Amélie Nothomb publie un livre par an, mais lensemble est lié, reconnaissable. Pas sûr quavec le dernier paru CV roman, Bestiaire domestique qui sannonce, Jdv qui se termine ou le précédent à lhumour de pied nickelés qui mavait été refusé, je puisse arriver à conserver une unique harmonie derrière mon nom dauteur. Jaurais limpression desquisser un visage à la Francis Bacon. Déjà quà loccasion de la réunion des représentants, mon éditrice a laissé entendre deux fois à propos de Bestiaire domestique que je changeais de style (avant de se raviser à chaque fois car largumentaire que javais fourni explicitait en quoi ce recueil de nouvelles sinsérait dans une certaine continuité). Déjà quà la parution de Paysage et portrait en pied de poule, un critique avait trouvé que je faisais un « virage à 180° » Pour les éditeurs traditionnels, trouver chez un auteur une certaine constance de style est importante. Elle se décline sans doute plus largement chez les éditeurs séculaires : pérennité, marque de fabrique, héritage... On nimagine pas Gallimard renoncer à ses fameuses couvertures jaunes à écriture rouge, changer davis et de politique éditoriale quant à des collections qui existent depuis longtemps et qui ont de fidèles lecteurs. Le risque commercial est trop grand. Soit, on peut le comprendre sans jouer les artistes purs, froissés devant un refus. Parallèlement, on peut avoir envie de changer ou de faire vivre la veine eau minérale et eau pétillante." (18/01/2009) "« Jdv, roman, travail en cours, manuscrit numérique de 66 pages à la date daujourdhui », ai-je écrit dans cette même rubrique il y a deux semaines. Ça laissait entendre un parcours régulier et il la été pendant un mois et demi. Mais depuis une dizaine de jours, le machin navance plus guère : jai écrit deux pages de plus et je me suis arrêté cinq jours après avoir écrit la phrase ci-dessus. Je ne sais pas si je reprendrai ce texte qui est assurément un écrit que je ne destine pas à être publié. Dun côté, jaime bien terminer ce qui est en cours surtout dans un pareil exemple où je sens que cette histoire est au trois quarts entamée. Je sais exactement ce qui va arriver à mon narrateur jusquà la fin de lintrigue et cest comme raconter un rêve, on éprouve le besoin de le faire entièrement, on se sent frustré si un réveil inopiné à écourté un songe qui vous a marqué. Jai limpression de laisser le narrateur que javais inventé en plan, il perd de sa chair, il devient sans avenir alors quil avait commencé à méchapper comme un voisin, une connaissance dont je raconte lhistoire. Écrire est vraiment drôle : on invente un personnage et on finit par croire quil existe vraiment. Dans ce cas précis, je sais exactement qui il est, quelle est son apparence physique, où il habite, je connais les lieux quil traverse, les amis quil côtoie, je suis lui. Cest vraiment une attitude de romancier que jendosse, dans le sens traditionnel : jai créé un personnage et il me tient : Madame Bovary cest moi (quoique dans ce dernier cas, il faudra que je fasse une note décriture spécifique tellement il y a à dire sur les écrivains qui invente un narrateur de lautre sexe et pourquoi). Bref, mon narrateur est au repos pour une durée indéterminée. Ce peut-être pour toujours comme dici à la fin de la journée je peux lavoir fait à nouveau bouger sur quelques pages, poursuite dun petit film intérieur, succession de touches lecture-stop, arrêt-pause sur le magnétoscope intérieur des idées imaginaires. Je ne peux pas savoir à lavance, écrire cest coup de tête et compagnie, cest ce qui fait le charme de la chose, de même que le carcan des théories, mort du roman, haro sur les fictions traditionnelles est fait pour être constamment transgressé : on écrit dans un large spectre de plume, un éventail de cliquetis de clavier qui va de lexpérimentation la plus folle et dérangeante à la ringardise la plus convenue dune littérature arlequin. Mais en ces jours précis jai besoin de temps pour avancer dans mes recherches universitaires, cest pas un narrateur mais bien moi qui serai évalué à la fin de lannée. Cest très scolaire et anti romantique comme attitude : jabandonne le rêve et la fiction pour le pragmatisme de la réalité. Ce qui met encore plus en abyme la question de la fiction et du réel, la question du narrateur avec qui on veut jouer et soi-même qui vit avec un seul cur dans un seul corps. Finalement un écrivain est vraiment un schizophrène et lécriture est la matière qui renouvelle constamment sa drôle de maladie. "(06/02/2009) "Cest drôle : Faux nègres est encore en pleine parution, les sollicitations vont avec, et le précédent titre, Ils désertent est maintenant en poche : livres qui saccumulent et forment un paysage mouvant, interchangeable. Cest drôle parce que, dans cette actualité multiple qui mélange anciens livres et nouveaux, on me demande : Et alors, vous êtes sur le prochain ? Sous-entendu, le prochain livre, la source intarissable de linspiration, la production permanente didées, de fictions, ma petite entreprise ne connaît pas la crise, chantait Alain Bashung. Donc le prochain ? Comment répondre Plusieurs idées, dont celle qui murit en moi, lentement, moccupe parfois lesprit dans les trajets de voiture (et ils sont nombreux) : oui, cette idée, ça pourrait faire un livre. Rien décrit toutefois, pas le moindre mot tracé, juste ceux qui me traversent, sagencent en paragraphes imaginaires, chapitres versatiles, histoire décousue. Et puis un autre, de livre, cette-fois ci bien entamé, aux trois-quarts, nom de code JDV, on en trouve des traces dans cette même rubrique fin 2008, début 2009. JDV donc, aux trois quarts terminé puis abandonné sans état dâme il y a cinq ans pour laisser la place probablement à lécriture de Retour aux mots sauvages, à la publication aussi de Bestiaire domestique bref, JDV revient, le texte relu, continué (un peu), lenvie étrange de terminer cette histoire, quelque chose de relativement simple à faire, un peu à reprendre, une facilité presque. Et pour autant, ne pas sy précipiter (la thèse à continuer), lintuition de laisser venir les choses, les laisser sinstaller de nouveau, se concurrencer (JDV et lautre livre, pas encore nommé, ni entamé, juste réfléchi en voiture). Etrange période donc, toute dévolue à la sortie du livre Faux nègres, aux sollicitations, et, déjà dans la projection de ce que pourrait être les mois à venir, quand lagitation se sera estompée, installé sur la table décriture (la table de peine, comme dit Pierre Bergounioux). Se pose également une question nouvelle pour moi, et très intéressante : peut-on continuer un texte écrit il y a plusieurs années ? Est-ce que lécriture se périme comme un yaourt ?"(17/09/2014) Le hasard est souvent étonnant. Tout dabord, en guise dannonce, sachez que je publie un nouveau roman en octobre, toujours chez Fayard : il sappelle Journal de la canicule. Le hasard donc, me fait corriger les épreuves de ce livre en cours de finalisation sous la météo adéquate, table de jardin sortie avec le soleil implacable dessus (voir en Webcam) et, dans les médias, les alertes abusives selon le fameux principe de précaution érigé en dogme (en aparté : très belle définition de Philippe Didion : on entre en canicule quand les journalistes remplacent le verbe « boire » par le verbe « shydrater »). On apprend ainsi que la France est le seul pays au monde où les rails de la SNCF se tordent de chaleur La canicule de mon roman date de 12 ans : épisode fameux qui sert de cadre temporel à ce journal quun type décide décrire parce que ses voisins ont disparu. Ça vous intrigue ? Je nen dirai pas plus, il faudra lire le roman ! Savoir juste que ce texte a été écrit à mi-chemin entre cette fameuse canicule et aujourdhui, donc commencé rapidement en hiver 2008-2009, cessé aussi rapidement (voir notes de lecture du 05/12/2008, du18/01/2009, du 06/02/2009) sans que je comprenne vraiment pourquoi cette histoire métait venue. La parution de Bestiaire domestique au printemps suivant et la rédaction de Retour au mots sauvages en automne ont achevé denvoyer ce texte aux oubliettes. Je lai retrouvé lannée passée (note décriture du 17/09/2014) en me demandant comment une telle histoire saugrenue métait venue à lesprit. Et puis une citation de Nabokov, que jai placé en épigraphe, ma soudainement éclairé : « Un journal, je l'admets, est la forme la plus basse de la littérature. ». Jai ainsi terminé ce journal-roman chez moi, au rez-de-chaussée, au ras des pâquerettes, bassement, petitement, comme une cousette de Prisunic. Il compte 255 pages, ourlets compris.(08/07/2015) Donc, voilà : le Journal de la canicule
est paru. Je suis très content de la couverture, que je trouve très réussie avec ses
couleurs chaudes, pas forcément faciles à rendre avec un aspect mat (voir objets du bonheur, cette semaine en Webcam). Il est
temps de créer une rubrique spécifique qui accueillera les commentaires, critiques,
articles, bref, la vie du livre : LA
VOICI. En parlant de la vie du livre, jy dresse comme à lhabitude un
historique du roman, comment, quand et pourquoi a til démarré et continué. Son
histoire remonte à fin 2008, époque à laquelle jai bâti les trois-quarts
dune histoire qui minterpellait sans que je sache dailleurs vraiment la
voie que je suivais. Mais les intentions décriture doivent rester un mystère, je
suis de plus en plus persuadé. Dailleurs javais participé autrefois à un
recueil collectif chez Catherine Flohic qui sintitulait « écrire,
pourquoi ? ». Ce serait maintenant jécrirais un article pour démontrer
pourquoi je ne sais pas pourquoi. Cette tension est salutaire, sinon on court après de
lartifice.
1/10/2015, Dans Le supplément littéraire du Monde, par Macha Séry 18/10/2015, le Journal de la Haute-Marne, 23/10/2015, L'affranchi de Chaumont 28/10/2015, le Journal de la Haute-Marne, par Françoise Ramillon 09/11/2015, chez Danactu résistance Du 10 au 17/11/2015, les InRocKuptibles, par Sylvie Tanette 25/11/2015, dans Libération, Sous le chaud du secret, par Claire Devarrieux 26/11/2015, Adepte du livre, attention, ça décoiffe :-) 07/12/2015, dans Les jardins d'Hélène, par Laure 30/03/2016, merci à Daniel Leprince dans ses Flâneries culturelles 28/04/2016, merci à Christian Chavassieux pour son article dans Kronix 20/05/2016, merci à Michel Thénard pour son article dans Voix 52
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