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Etonnements 2000-2001
On sonne à la grille, cest le vendeur de sapin ! Il a
garé sa camionnette, déballe les arbres de sa remorque, fait larticle en me les
présentant par le sommet.
- Pas mal celui là, non ? Bien fourni dans les branches basses
Jen prends deux (il y a celui dune voisine également). Le vendeur rattache
ses arbres sur la remorque, jappuie les sapins contre le mur de la maison, je
frissonne, il gèle. Je reviens vers lui, je paye, on discute un peu. Du temps qui
pourrait tourner à la neige mais il fait trop froid, ce nest pas encore pour
aujourdhui. Quelques phases banales, on ne se voit quune fois par an.
- Bon, ce n'est pas tout ça, encore du boulot, dit-il.
On se serre la main en souriant, apporter des sapins, cest de la joie.
Je rentre dans la maison. En haut de lescalier un enfant minterpelle :
- Alors, on a un sapin ?
Odeur daiguilles dans le garage. Il faudra que je descende le carton des boules et
des guirlandes du haut de létagère. Mon fils préfère les sapins artificiels, il
me la dit lautre jour et je soupçonne son imagination technique : ce
quil lui plairait cest de déplier un sapin comme un parapluie.
Je coince le tronc entre deux briques de laitier dans lhabituel seau rouge garni de
graviers, qui ne sert quà cela et que je ressorts chaque année sans hésiter de
mon atelier (plus tard, sous le poids des guirlandes, le sapin basculera par deux fois
contre la fenêtre avant que je le cale un peu mieux dans le seau avec du polystyrène
tandis que ma fille attrapera des crampes à le maintenir).
Je me souviens des sapins de mon enfance illuminés de bougies dans des coupelles pincées
au bout des branches. Quand je rends visite à mes parents, nous discutons jardinage avec
mon père en arpentant le terrain. Nous contournons un sapin qui grossit dannée en
année, et je me demande à chaque fois depuis combien de Noëls il est replanté.
Je me souviens de lannée dernière, le vendeur de sapins était venu avec son fils,
un peu attardé comme on dit, et qui tendait larbre en silence en me dévisageant.
Je me souviens à Paris des prix prohibitifs des arbres de Noël dans lîle de la
cité. Je me souviens davoir eu une soudaine envie dhabiter là-bas dans un
appartement donnant sur cette place, exactement au centre de la capitale, et jaurais
dépensé des fortunes pour acquérir un sapin sil avait fallu.
Artificiel ou naturel ? Je ne me pose jamais cette question, tant sont prépondérants
depuis toujours dans ma vie les véritables sapins.
En janvier, je balance larbre dépouillé dans le jardin.
Plus tard, je le ramasserai en même temps que la première tonte de la pelouse. Je sais
déjà que je penserai : cest Noël qui sen va, fuite du temps, et nous
partons vers les beaux jours.
Je complèterai peut-être mes pensées en comptant les neuf mois qui me séparent du
prochain et de la visite du vendeur de sapins. Jespère quil y aura son fils.
(19/12/2001)
Homonymie :
Charonne : femme fabriquant des chariots,
charrettes ainsi que les roues de ces véhicules (définition Petit Robert)
Charon (Stone) : Actrice américaine. A joué dans Basic Instinct
(1992), Casino (1994).
Charonne (métro) : le 8 février 1962, la police de Paris a chargé à
cet endroit des manifestants anti-OAS, bilan : 9 morts.
Charon (Ariel) : ancien militaire, ministre de la défense dIsraël
en 1982, impliqué dans les massacres de Chabra et Chatila (3000 victimes). Depuis 2001,
responsable de lhistoire mondiale en marche.
(12/12/2001)
Détendu en vacances, quand on rentre, on sest fait plein de promesses. On se
sénervera plus, on va faire preuve de patience, de tolérance, dun flegme
philosophique à toute épreuve. Et pourtant, à peine rentré, nos bonnes résolutions
sémoussent : tracasseries en tous genres, vie domestique qui reprend, mauvais temps
qui nous cloître dans une pénombre permanente.
Une journée de plus et cest la colère pour un prétexte futile mais habituel et
connu : les devoirs des enfants. Cris, gestes brusques, pleurs en réponse, en deux
minutes, on réalise que les promesses de vacances se sont envolées. On se sent coupable
de semporter si vite. On réfléchit, on essaie de se modérer. Bien sûr,
cest la peur qui fait agir ainsi, peur de voir ses enfants louper un devoir, une
matière, une classe, leur avenir. Scénario catastrophe souvent injustifié mais qui nous
fait bondir, nous dresser sur nos gardes, la vie est si dure, pensons-nous.
Et pourtant ? Dure, oui, à nos yeux deuropéens mais que dire par rapport aux
habitants du pays que lon vient de quitter ?
On ne peut pas comparer, comme disait notre guide, car il faudrait avoir les deux oreilles
identiques et cela, mes amis, ce nest pas possible.
Donc, ne comparons pas. En pensant à ce pays, il me revient la scène de deux marchands
se querellant sur un marché : lun a fini par envoyer une chaise (en plastique mais
tout de même) sur le dos de lautre qui senfuyait avec la voix déformée par
la colère même si on ne comprenait pas les paroles, il était facile dimaginer son
courroux. Querelle pour une place au marché ? Un client pris à lautre ? Nous avons
passé notre chemin en pensant : nous au moins nous ne nous fâchons pas (cest
facile en vacances, cette certitude idiote...). Mais bon, quelques jours plus tard,
de retour au bercail
Ainsi, est-ce le quotidien qui nous énerve ? Une suite de tracas ? Une accumulation de
choses qui devraient de se passer autrement ? La peur au bout et la colère qui éclate ?
Je ne sais pas conclure cet épisode, ni en tirer un enseignement. Pour le faire, il
faudrait admettre la discontinuité du temps, renoncer à se projeter dans lavenir
et ainsi séviter des désillusions, des peurs, donc des colères, mais là aussi,
ne pas se projeter dans lavenir est la chose la plus inconfortable qui soit.
La colère, lénervement sont certainement légitimes et sains. L'idéal serait de
toujours respecter celui à qui elle sadresse et cest en théorie facile car
la colère est une marque dintérêt, voire damour quand il sagit de
notre progéniture. Cest en quelque sorte un dialogue qui sinstalle. Au-delà,
dans les extrêmes, on tombe dans la vengeance, voire le terrorisme. Nous marchons
constamment sur le fil du rasoir.
(05/12/2001)
En Egypte, tout est étonnement.
Par exemple, la limite des cultures tranchée net par le désert jaune et aperçue depuis
le hublot de lavion.
On atterrit, on est curieux, avide de tout voir. Claque de la chaleur au sortir du
fuselage. Le hall, les peaux halées, les bagages. Vite, vite. On se retrouve devant un
bus en un temps record, pris en charge, guidé.
Etonnement encore à travers les vitres du car : grappes humaines pendues après des
véhicules hétéroclites. Bruits. Foule. La poussière partout. Le guide que lon
entend par bribe : 16 millions dhabitants au Caire
Les mosquées
La
circulation
Lambiance jaune : immeubles inachevés, trottoirs, mosquées,
goudrons des rues, tout semble recouvert docre.
Etonnement et réflexes deuropéens : remarquant les détritus entre deux immeubles,
les ânes, les carrioles, le désordre apparent. Il ne pleut jamais. Je pense à
Montpellier un soir de canicule et mon soin à éviter les crottes de chien en marchant
sur les trottoirs.
Lhôtel, luxe, service impeccable, on est des européens, vraiment. Dehors, passé
le choc de larrivée, rien ne viendra démentir les premières impressions : le
monde partout et pas seulement au Caire, le désordre encore, les souks, les petits
boulots, les militaires, les taxis, toute ces occupations.
Européens en short, autochtones en djellabas pas toujours propres, (Est-ce que chez nous
les paysans ou les garagistes travaillent en complets vestons ? ) on se frotte à cette
population qui prie cinq fois par jour. Cest le Ramadan, les gens sont heureux et
plein de ferveur. Franchouillards laïques, on y voit du folklore, ou pire de
lintégrisme, on comprend tout de travers.
Des jours passent encore. Des temples, des pyramides, la vallée des rois, le Nil, ce
quon est venu chercher et qui nous émerveille.
Et les gens. Létonnement, comme le soleil et la poussière, rentre par tous les
pores de nos peaux claires. On se fond déjà plus, on devient perméable, on
sétonne juste encore un peu des bakchichs incessants, on apprend à dire
merci, bonjour, au revoir en égytien.
Les jours nous rapprochent de la fin. On repense aux instants merveilleux. On
saperçoit curieusement que la vie immédiate des souks a pris autant
dimportance que les temples millénaires et les tombeaux des morts. On
sétonne encore : on a retenu les bruits, les mouvements, deux pyramides
dindigo et de safran sur un étal devancent curieusement dans mes souvenirs celles
de Kheops et de Kréphren.
On retient une dernière image : un égyptien nous tire par la manche en souriant pour
quon se réchauffe auprès du feu quil a allumé. Cest le crépuscule,
lheure de la fin du jeûne. Partout on sinstalle pour manger au milieu des
rues. Cest la joie.
Puis, il est temps de repartir.
Aéroport Charles de Gaulle. Une heure pour récupérer deux valises. Tourné 20 mn dans
le parking avant que lon mexplique la façon de le payer et den sortir.
Dans ma valise, mon guide refermé précise que "nous devons être indulgent car
les services en égypte sont plus lents quen France ". La route, on arrive
à la maison dans le brouillard. Cest le jour de la Sainte Catherine, il y a la
foire, en quelque sorte notre souk. Mais le temps nincite pas à
Et quel
vendeur de marrons chauds viendra me tirer par la manche pour que je me réchauffe ?
(28/11/2001)
On part toujours vers 7h30. Ce matin-là, le vent est frais, on
sort pour ouvrir la grille de la cour. Chauffage à fond dans la voiture. Lautomne
doux sest brutalement terminé depuis quelques jours déjà. On passe devant le
lycée. Bousculade de bus, lycéens emmitoufflés sur les passages piétons.
Conversations, rires, vapeur qui séchappe des visages dans lair froid. On
poursuit par des rues plus tranquilles, on rejoint la voie de contournement. La voiture
prend son allure de croisière, on sachemine vers la route de Paris. On
sinstalle au mieux dans l'habitacle, le manteau sur le siège passager. On cherche
la station Radio-Nostalgie dont les enfants se moquent. On arrive au rond point. Le camion
qui le contourne passe devant le capot et sengage sur la même bretelle. A la radio,
cest ce vieil air de Cat Stevens, " Morning is broken " ou quelque chose
comme cela. Balade douce à la guitare, accords faciles à trouver.
Et soudain, les flocons qui arrivent, en masse, dodus, les premiers flocons de l'hiver,
lespace devient blanc, juste lombre de la remorque bleue du camion devant moi.
La balade à la guitare. Lair blanc. On roule au pas derrière le camion dans la
courbe de la bretelle. On devine le bas côté qui défile lentement. Touffes
dherbes, goudron noir, danse blanche des flocons. La première neige de novembre, un
émerveillement denfant, une sorte de Noêl. Le souvenir incongru qui revient chaque
année : un défilé du onze novembre dans ma ville natale, le froid et les premier
flocons sur la place de la mairie, on devait avoir dix ans. Cette vieille chanson et la
voix qui reprend "morning is broken ". On débouche sur la quatre-voies.
Quatrième, cinquième vitesse, on double le camion. La neige s'arrête aussi soudainement
quelle a commencé. On continue à penser encore pendant quelques kilomètres à
cette première neige de novembre sur les accords de Cat Stevens.
(13/11/2001)
Ces dernières semaines, on a fêté tonton Georges un peu partout. Pas un journal, pas
une radio, pas une télé qui ne lui ait rendu hommage à loccasion des vingt ans de
sa disparition (et la crainte de le voir réduit à des émissions aux accents trop connus
de " hommage à
", filon commercial dont pâtissent Coluche et Gainsbourg
depuis de nombreuses années ou de servir de faire-valoir à des interprètes se
découvrant un engouement de dernière minute pour lartiste devenu soudainement
vendeur
). Cette véritable Brassens-mania organisée et prévue depuis de longue
date (il ny a quà regarder depuis fin aôut les têtes de gondoles des FNAC
et autres polymorphes de la culture ornées de cassettes vidéo, DVD, compilations et
bouquins divers pour sentir quil allait se passer un évenement marketing) aurait
fait sourire Brassens, même si le succès ne lui était pas indifférent, du moins on le
suppose.
Car tout est là : on suppose, je suppose, nous supposons, ses amis que lon raccole
à loccasion démissions souvenirs supposent, tout le monde suppose. Avec
Brassens, on agit comme avec un oncle sympathique, disparu depuis longtemps et qui aurait
laissé traîner ses souvenirs un peu partout dans nos familles : on suppose, on aimerait
savoir ce quil aurait pensé, dit, imaginé dans toutes circonstances et
lactualité nous fournit depuis des années une inépuisable source de sujets à
mettre en face de lombre tendrement anarchiste quil a révélé dans nos
curs. Car cest peut-être cette poésie quil a su glisser en nous (et
qui nous le fait oublier pendant des années, pressurisé par un quotidien souvent
incompatible avec ses bluettes et ritournelles), qui ressort au grand jour pour en parler
ensemble, en se découvrant tous cousins dune grande famille.
(07/11/2001)
Tout dabord existaient la maternelle et lécole
Victor Hugo. Mes enfants y sont allés. Javais le choix avec Gambetta, les deux
établissements étaient honorables, jai choisi Victor Hugo, allez savoir
pourquoi !
Et puis il y eut la construction de cette résidence, il doit y avoir plus de quinze ans
maintenant. Cet immeuble fut bizarrement recouvert de carreaux de faïence bleue. Comme il
jouxtait lécole, on la nommé aussi Victor Hugo. Et pour bien marquer ce nom,
larchitecte a fait réaliser sur lune des façades un camaïeu dessinant le
gigantesque visage barbu de lécrivain. Ainsi tourné vers la vaste et circulaire
place Charles de Gaulle (tiens, un autre destin d'homme politique et d'écrivain...) et
semblant fixer la bibliothèque médiathèque à de lautre côté de la rue, on ne
peut louper le regard de faïence de Victor en montant sur le pont qui passe devant
l'immeuble.
Cest de lautre côté du pont, juste en bas que quelques années plus tard
jai acheté ma maison dans une rue qui porte le nom dun autre écrivain,
Anatole France. Mais bon, avec Victor, nous sommes proches maintenant...
Il fait tellement partie du paysage que nous oublions souvent que la résidence porte son
nom.
Car, il faut dire quentre voisins, nous avons eu lhabitude de nommer cet
audacieux immeuble recouvert de carreaux de style salle de bains, le Lavabo, au risque
den oublier le visage barbu et sévère qui garde la place Charles de Gaulle.
(31/10/2001)
Passer de la réalité à la fiction, de la fiction à la
réalité, il y a ces échanges incessants que nous avons maintes fois constatés. En
voici encore de nombreux exemples.
Il y a quelques mois (le 12 avril exactement, si lon en croit une note
détonnement dans cette même rubrique), tandis que je rendais visite à la revue
Inventaire-Invention, la vision réelle dune affiche dAction contre la faim
sur un quai de métro à la station Porte de la Villette, mavait suggéré
lidée dune nouvelle Vers Aubervilliers.
Premier passage de la réalité vers la fiction, donc.
Cette nouvelle est écrite quelques semaines plus tard, est logiquement proposée à
Patrick Cahuzac pour Inventaire-Invention. Elle est publiée depuis le 11 octobre, à la
fois sur le site de cette revue mais également en livre.
Deuxième passage, où la fiction rejoint la réalité dun objet en forme de livre.
Enfin le 18 octobre, cest avec grand plaisir que je reprends le métro en direction
dAubervilliers pour fêter cette parution et dautres lors dune
rencontre-lectures au siège dInventaire-Invention.
Quelle nest pas ma surprise de découvrir dans la même station Porte de la
Villette, la même affiche dAction contre la faim que celle qui mavait
inspiré cette nouvelle !
Troisième passage et retour de la fiction vers la réalité, enfin, je ne sais plus trop.
Dans Vers Aubervilliers, il est question du numéro de téléphone dAction
contre la faim que je nai pas eu le temps de noter. Mais là, bien sûr, on y
est attentif, cest le 0800 699 699.
On le note sur un papier pour ne pas loublier, comme pour compléter tardivement,
conclure cette nouvelle.
Cest le quatrième passage, de la réalité vers la fiction.
Le cinquième passage de la fiction vers la réalité vient davoir lieu : jai
téléphoné ce jour à Action contre la faim au 0800 699 699.
(24/10/2001)
La littérature souffre souvent dune image austère. Le mot
écrivain évoque un poète rêveur et solitaire ou un personnage éternellement
tourmenté. Victime de cette réputation, les écrivains qui se regroupent, soit se
sentent obligés de coller à leur personnage, soit sont tentés de casser cette image en
adoptant une convivialité de potaches, mais encore dans ce dernier cas
nétonnent-ils personne car les manifestations purement littéraires regroupent un
public damateurs déjà conquis par les livres.
Cest ce constat qui poussera les Ecrivains de Haute-Marne a investir le traditionnel
marché couvert hebdomadaire de Saint-Dizier. Au milieu des fruits, légumes viandes
poissons et fromage, les écrivains partiront à la rencontre des ménagères à cabas, un
peu comme des politiciens en campagne électorale, histoire de déranger un public
traditionnellement occupés à acquérir d'autres nourritures, de montrer que les livres
sont consommables comme de bons produits du terroir et que les écrivains nont rien
à envier à la harangue des maraîchers. Chacun aura à cur de défendre haut et
fort ses livres en face de ses collègues de plume dans cet esprit de plaisanterie et
damitié qui nous réunit souvent. Il y aura du tohu bohu samedi 20 octobre au
marché couvert !
(17/10/2001)
Ce 12 avril 2001, en ressortant de la station Fort
dAubervilliers, on est déjà préoccupé, mal à laise, (lire " Vers Aubervilliers "), mais tout
de suite, on émerge du sol sur ce vaste carrefour cerné dimmeubles, on reconnaît
le Métafort à quelques mètres et juste derrière la vue extraordinaire sur un fouillis
inattendu de verdure, de potagers et de jardins ouvriers.
On a la sensation, comment dire, que le monde est là, brutal mais tellement vivant. On
sent inconsciemment quon doit tout enregistrer : lépave de voiture
devant la porte de garage vermoulue, le type qui longe le trottoir avec un escabeau sous
le bras, les passants et leurs airs décidés de savoir ce quils font là, en être
pleinement conscient. Lombre des bâtiments est dense, les fenètres habitées de
silhouettes. Et ces jardins ! Il est tôt, on aperçoit juste deux ou trois têtes
courbées devant des légumes, comme si était résumé ici un concentré de vie, les
gamins qui partent pour lécole, le type dâge mur avec son escabeau, les
retraités qui ont glissé du béton des immeubles den face vers la terre des
potagers.
La vie est là, on la sent palpitante, on comprend lerreur de la chercher tapie dans
les immeubles cossus de la capitale. Ici, cette vague impression que personne ne joue un
rôle, on ne triche pas.
Du moins pas comme on limagine.
Ce 3 octobre 2001, en ressortant de cette même station, il y avait un contrôle de
billets de Métro, le gamin est passé en force, avec aplomb et franchise en bousculant
les contrôleurs. Quelques vociférations. On laperçoit un peu devant sur
lesplanade, son pas toujours nonchalant, rejoint par un de ses copains qui tourne
autour avec un vélo en rigolant. On rentre au Métafort pour la première fois. Les rires
des gamins se perdent derrière dans les légumes des jardins proches.
(10/10/2001)
Je lavoue, jai lhabitude de fréquenter les
soldeurs de bouquins. Et sans honte, car cela ne mempêche pas dacheter des
livres neufs chez François Larcelet, lexcellent libraire de ma ville (sa librairie
se nomme Lattente-loubli, et cest déjà un gage de
qualité
) voire occasionnellement à la FNAC bien que je préfère éviter ces
grandes surfaces de culture intensive doù jen ressors toujours énervé de
mapercevoir de labsence dauteurs comme Bergounioux au profit
dimmenses piles de Beigbeder
Mais bon, vu ma boulimie de lecture, les passages chez les soldeurs me sont obligatoires
pour éviter de me ruiner. Et puis, je trouve attachant cette idée de donner une
deuxième chance à un livre doccasion. Sy ajoute bien entendu le plaisir de
fouiller et surtout, cest souvent le seul moyen de se procurer un des trop nombreux
livres " épuisé " (dailleurs qui est
" épuisé " ? Lauteur, dattendre une réédition
improbable de son livre ? Le lecteur, de chercher vainement ? Léditeur,
obnubilé par la recherche du nouveau plutôt que ressortir les vieilles lunes ?)
Donc, je parcours régulierement les caisses de bouquins en vrac, soulève les tranches,
fouille les couvertures, les titres, les auteurs
Avec toutefois, cette appréhension
nouvelle depuis ma première publication de retrouver mon bouquin dans les piles. Quelle
sera ma réaction ? La puissance de ma déconvenue ? La réalité de mon
abattement ?
Et justement, ce jeudi 27 septembre vers 14h, à deux pas du Boulevard St Germain,
japerçois mon nom sur une couverture ! Excitation suprême, bizarre, comme si
javais découvert un exemplaire recherché de Cendrars, un autographe de Genevoix,
une édition rare de René Fallet
Tout de suite, on regarde le prix : soldé 20
balles
Limpression quil vaut plus, tout de même cest mon
bouquin ! Mais en même temps, content quil ne vaille pas plus cher car on sait
déjà quon va lacheter, ce qui peut paraître un réflexe idiot et bizarre.
On feuillette : les pages de garde (pas trace de ma signature précédée dun
cordialement, ce nest donc pas un exemplaire de presse), lintérieur,
laspect (il semble à peine feuilleté, aucune mention, phrases soulignée
Le
lecteur inconnu pressé de sen séparer, la-t-il lu ?).
Mais, mis à part ce soudain et habituel intérêt de la découverte, pas dautre
sentiment, pas de déconvenue, pas dabattement en vue. Même mieux, on se sent
soulagé comme si le fait de trouver le livre en solde terminait le cycle habituel des
pérégrinations de celui-ci. Comment dire : une sorte de séparation de
lenfant-livre, il a grandi, il se débrouille tout seul, passons à autre
chose
A la caisse, je me sens obligé de signaler ce fait extraordinaire à
lemployée : cest mon bouquin et je lai trouvé. Elle me regarde
comme si jétais un martien, finit par me bafouiller que ce nest pas de sa
faute et quelle espère que je ne sois pas trop vexé
( !)
Quelques jours plus tard, (je suis toujours autant surpris de ne pas ressentir de
déconvenue) je gomme la couverture un peu salie par le frottement avec les autres livres,
la tranche des feuilles un peu noircie. Je regarde mon livre : presque neuf !
Pour un peu je pourrais le refiler à son prix dorigine
PS : jai également acheté chez ce soldeur le
livre de Jacques-Pierre Amette (Ma vie, son uvre) paru quelques mois
auparavant, et dont lun des passages les plus important est la découverte amère de
son livre chez un bouquiniste par le héros écrivain de ce roman. A lire en Notes de
lecture.
(03/10/2001)
La poésie, donc, ne sert à rien, est inodore, incolore, soluble
dans lair, inoffensive ( ?), pourtant on linterdit : dernier
autodafé en date, la chanson (dailleurs, la chanson est-ce vraiment de la poésie,
quen pensez-vous messieurs Brel, Brassens, Ferré, Aznavour, Nougaro ?)
" Imagine " de John Lennon , déclarée
" inécoutable " sur nombre de radios américaines pour cause de
guerre imminente
Exit donc pour un moment le refrain " Imagine all the
people
", aussi simple, scandant et facile à retenir que " une
souris verte, qui courait dans lherbe ", car la poésie est aussi musique
et vice versa.
Rappelons que le poète Lennon a milité contre la guerre du Viet Nam et fut assassiné à
New York en décembre 1980
(26/09/2001)
Mercredi 12 septembre, éprouvant le besoin de marcher en forêt,
retrouver le calme après les images de New York. Respirer.
Le calme ? Partout dans la forêt, ce qui rappelle la tempête dil y a deux
ans : arbres en tous sens, obliques, couchés, la terre remuée en mottes
gigantesques par les déracinements, les chemins habituels coupés, lacérés par les
troncs, les branches. Dautres chemins aussi, impraticables, creusés par les
passages des engins de débardages. Tas de bois partout. Il y a eu déjà tellement de
travail accompli mais la tâche est immense et il faudra sans doute plusieurs décennies
pour effacer les traces.
Ailleurs, au sortir du bois, on simagine que tout cela est terminé : on ne le
voit plus à la télé. Je ne peux mempêcher de penser au chaos des deux tours
écroulées, combien de temps pour quelles restent au premier plan de
lactualité, pour en réparer les traces.
Je sens déjà vos objections, le drame de cette tempête oubliée, des forets dévastées
sont sans commune mesure avec les milliers de victimes de New York et Washington.
Pourtant, à quatre-vingts kilomètres de ma promenade, ce sont des bois semblables, ceux
de Verdun. Les habitants, les habitués de ces lieux savent que cents fois plus de
victimes de la grande guerre dorment encore dans les ornières, sous les racines, les
vestiges de tranchées La forêt a repoussé bien sûr mais elle garde les traces pour
encore de nombreuses générations à venir. Pas un bûcheron du coin qui nait
laissé un jour une chaîne de tronçonneuse sur un éclat dobus planqué dans un
tronc.
New York et Verdun suffisent, pas la peine de rajouter dautres traces indélébiles
en Afghanistan ou ailleurs...
(19/09/2001)
Loana, écrivain. On entend cette nouvelle à la radio, Loana va
écrire un livre pour raconter sa vie. Cest la formulation de ce scoop par le
journaliste qui nous interpelle : Loana, écrivain !
Deux mots si différents. Loana, égérie du Loft, synonyme de produit marketing au risque
doublier que quelquun existe derrière la chevelure blonde. Ecrivain et on
repense à Michel Chaillou se demandant récemment le plus sérieusement du monde
sil méritait bien ce titre
Ecrivain au sens de quelquun qui a écrit un livre, oui, on est daccord, Loana
est écrivain, aura certainement rédigé, dicté quelques souvenirs de sa vie et peu
importe de savoir si quelquun dautre organisera ses mémoires à sa place,
cela fait partie dun jeu connu depuis longtemps. Et oui encore pour Loana écrivain,
dans la mesure où depuis Charlemagne et Jules Ferry, beaucoup dentre nous, les
Robert, Marcel, Paulette ou Loana ont appris à lire, écrire, formuler nos pensées en
phrases écrites et cest merveille que cela, merveille aussi davoir pu aller
en grand nombre beaucoup plus loin, gratter aux confins de la montagne quest la
littérature.
Donc Loana, écrivain et nous espérons que son éditeur, qui se frotte déjà les mains
davance devant le succès financier prévisible de ces mémoires, saura réinvestir
et donner sa chance à un type parfaitement inconnu, en marge des préoccupations du
marché, venant solliciter un rendez-vous, timide et mains moites, son manuscrit sous le
bras, nosant se qualifier décrivain
(12/09/2001)
Choisir un bureau. Entrer dans les But, Conforama. Rien hormis
les horribles tables informatiques biscornues, sans âmes, dépliables à linfini et
accompagné de laraignée à roulette qui tient lieu de chaise. Et le vendeur qui
saccroche à vous, simpose, vous fait sentir que vous êtes hors norme (Mais,
monsieur, cest ce qui se fait maintenant !). Suivre le troupeau ou changer de
registre. Aller dans les magasins de meubles. Répliques dancien. Merisier, chêne.
Le vendeur ne vous suit pas, juste un regard suspicieux sur la garniture supposée de
votre portefeuille
Et justement, on regarde, on ouvre les tiroirs, on en veut pour
son argent mais cest folie tout de même que ces meubles qui nont de tradition
que le nom : la façade en bois massif " patinée à
lancienne " et les parties cachées en aggloméré
Et puis on rentre par hasard chez un menuisier isolé. La pancarte Entrée libre, le
minuscule magasin dexposition désert, encombré de meubles plus ou moins finis, on
ne vient pas vous voir, juste quelques bruits dans latelier à côté, on reste dans
lobscurité et la bonne odeur de bois. Et tout au fond, on aperçoit un bureau
superbe, oublié depuis des lustres, soldé de moitié, exactement celui dont on rêve.
(04/09/2001)
" Etymologiquement, le mot étonnement vient du latin classique attonare,
qui signifie frapper du tonnerre. Mystérieux tonnerre qui échappe à nos organes des
sens, car il surgit de la rencontre entre deux niveaux différents de la réalité.
Faudrait-il s'étonner que les poètes soient les témoins privilégiés de cette
rencontre ? " (Préface de Basarab Nicolescu à Létonnement Poétique
de M.Couquiaud - LHarmattan)
(29/08/2001)
Au hasard, il y a déjà longtemps, en 1986, javais acheté
les deux bestiaires (Bestiaire sans oubli et Bestiaire enchanté) de cet
auteur dont je ne connaissais rien. Cétait pour lire à la plage en Corse, lors de
vacances tardives. Et le charme tout de suite dune lecture profonde, lente et calme
en accord avec la douceur doctobre, le mouvement des vagues, la plage déserte.
Depuis, Maurice Genevoix est devenu un incontournable pour les vacances et, comme
luvre est abondante, je nai pas encore entamé le temps des relectures
de ses excellents livres qui ne lassent jamais comme regarder le mouvement des vagues.
(16/08/2001)
Devinette : je pars en machin en vacances :
- Je dors sur le toit
- Le machin nest
pas un camping car
- Je dispose de 4m2 pour 4 personnes
- Le machin nest
pas une tente
- Je conduis la voiture
- Le machin nest pas une caravane
- Jai tout : une cuisine, des placards, des lits
- le machin nest pas un hôtel
- Je lemmene partout
- Le machin nest pas une location
- Jentretiens son âge vénérable de dix-sept ans
- Le machin nest pas une cabane dans les arbres
(18/07/2001)
Le type en photo à un air satisfait de chef dentreprise à
une tribune. Ce qui déroute, cest quil tient un bébé dans les bras et
quil semble lui donner le biberon.
On lit le texte de larticle : on apprend que le type cravaté est bien un chef
dentreprise, un grand, numéro 2 du Medef, PDG dun groupe spécialisé dans
les jouets pour enfants. Il présente " son dernier né ", un poupon
de celluloïde bourré delectronique. Il en parle avec une satisfaction de winner,
on apprend que cest linnovation qui sauvera les entreprises françaises, ce
jouet en est un exemple. Il cite des chiffres : 150 000 lannée passée, on
prévoit 180 000 cette année. Ventes, courbes, marketing, motivation. Haut les
curs ! Dans ses mots, lenfance, linnocence est salie.
Je voudrais que les circuits électroniques de ce poupon se dérèglent et quil lui
fasse pipi dessus.
(04/07/2001)
Soleil ce matin 19 juin, mais frais, mains froides, gilet.
Passant devant la poste, les deux employés, lhomme, la femme, descendant les
marches, sapprochant du camion déjà ouvert.
Lhomme : ça vient doù, ça ?
- Vitry (voix du camionneur invisible)
Lhomme : il est à qui le camion, ça ?
Moi, déjà passé, trop loin pour entendre la réponse, pensant au postier, ses
questions, le ça, un chiant, pas décidé à travailler, cherchant des prétextes.
Belle journée tranquille. Traversant la rue pour être au soleil. La femme devant moi, me
coupant le chemin, clés de voitures dans une main, plantée devant la vitrine du
pressing, regardant les prix affichés. Plus loin, derrière le coin de la rue, une
nettoyeuse automatique comme un mini-tracteur balayant le trottoir, laction des deux
balais rotatifs en poils jaunes. La cabine du conducteur, son visage, un essuie glace dans
un coin du parebrise. La machine passant à côté de lhorodateur et létrange
distributeur de sac poubelle, installé depuis peu, en métal peint en vert avec le
pictogramme dun chien et la mention Kioscan. On comprend lusage.
(27/06/2001)
Ce type à un salon du livre, qui mapostrophe :
- Cest vous qui avez écrit Central ?
Moi, heureux, qui acquiesce et lui :
- Cest long non ? Un peu trop
Enfin, cest un défaut de
débutant
On veut toujours faire long
Moi, désarçonné, argumentant, et lui, sans mécouter, se saisissant dune de
mes phrases pour conclure :
- Ah ? Parce que vous êtes du genre qui écrivez sans plan ? Il y a deux
genres, les " avec ", les " sans "
Moi, ayant découvert un nouveau " genre " de lecteur : les
tueurs décrivains.
Ne plus jamais leur répondre, à fuir comme la peste.
(21/06/2001)
Aller à la BNF, cest sarrêter à la station
"bibliothèque François Mitterrand ". Sortir de la station. La pancarte BNF,
prendre lescalier. Se demandant comment faire quand on est handicapé, ou vieux,
ou malade : la raideur des escaliers, le nombre de marches, létroitesse.
Traverser une sorte de pont. Tout de suite, se heurter à un vaste chantier. Marteau
Piqueurs, bruit, ouvriers casqués, camionnettes, le trottoir maculé de coulures de
béton. Traverser la rue, Passer ensuite devant un immeuble en réfection, déjà bien
avancé, les vitrines neuves, le chantier derrière, moquettes, bidons de peinture, des
ouvriers rentrent, cottes pleines de taches, dautres transportant des tuyaux, des
outils, des objets divers.
La BNF que lon voit pour la première fois, on sait déjà larchitecture avec
quatre tours en forme de livre entrouvert. On voit derrière les vitres des façades, des
cartons, des ombres, une fourmilière. Pénétrant au sous-sol par un tapis roulant
incliné. La pancarte : glissant en temps de pluie. Décidément, il faut
être en forme pour venir ici !
Visitant lexposition brouillons décrivains. Jardin des délices.
En ressortant, on repasse devant les tours en forme de livre entrouvert. Dans quels
bureaux, dans quels cartons se cachent des manuscrits oubliés ? On se prend à
rêver.
En passant devant limmeuble en réfection, une quinzaine de types cravatés est
devant le trottoir, une visite de chantier ? Derrière une grande vitrine, des tables
inattendues ont été nappées. On comprend quils vont déjeuner ici. Il fait chaud,
beaucoup sont en bras de chemise. Une climatisation a été installée en provisoire et
étend sur le trottoir ses tuyaux daération recouverts daluminium comme une
pieuvre argentée.
(15/06/2001)
LJH ne se lit pas dans un salon de coiffure :
Une amie, écrivain et journaliste, à qui javais recommandé
la lecture de Perfection de LJH a voulu commencer ce récit chez sa coiffeuse
habituelle. Elle a cessé au bout que quelques minutes, parce que toute lattention
que réclame la prose métaphorique de LJH est incompatible avec un salon de coiffure, où
elle mavoua que le magazine Gala (dont les métaphores sont certes plus
réduites...), correspond plus à une lecture badine entrecoupée de réflexions
métaphysiques avec la shampouineuse... (mais pourquoi les coiffeurs se croient-ils
obligés de faire la conversation ?)
Tout cela minterpelle sur les lieux où telle lecture est impossible, ce dont nous
nous souvenons mal par rapport aux endroits qui nous laissent un souvenir impérissable,
aux élans que nous ont procuré nos premiers émois par rapport à un auteur. Ainsi,
Maurice Genevoix dont les bestiaires lus sur la plage (une histoire danimal, un coup
de soleil, une vague et ainsi de suite ayant constitué un cycle impérissable dans ma
mémoire) en ont fait le compagnon de toutes mes vacances depuis vingt ans. Aussi de
Blaise Cendrars et ma lecture inoubliable de lOr, sur une minuscule et
tranquille terrasse brûlée de soleil en Corse pendant la sieste de mes enfants. Ainsi
Beckett découvert dans un Mac Do en attendant dintervenir dans une conférence
professionnelle sur Internet ...etc, etc...
Par contre, la mémoire des lieux impossibles pour lire nous échappe, linstant où
lon referme le livre avec délice (oui, délice car on sait que la lecture reprendra
plus tard..) parce quon a le sentiment que le lieu est en désaccord avec ce
quon se projette de lire.
(31/05/2001)
La récente polémique sur Loft Story m'a amené à m'interroger sur mes habitudes
télévisuelles, donc, voici un inventaire exhaustif de ce que j'ai regardé du dimanche 6
au samedi 11 mai :
-Dimanche 6 mai : rien
-Lundi 7 mai : Greysoke, la légende de Tarzan, de 21h à 23h, France 3
-Mardi 8 mai : Le huitième jour, de 21h à 23h, TF1
-Mercredi 9 mai : la prise de pouvoir de François Mitterand + Le cerveau de
Ravel, de 21h30 à 23h00, Arte
-Jeudi 10 mai : Conversation avec un président, de 21h30 à 23h, France 2
-Vendredi 11 mai : Bouillon de culture, de 23h à 0h15, France 2
-Samedi 12 mai : Plein les yeux, de 22h à 23h, TF1
A noter quelques zapping sur Soir 3 (France 3) pour les actualités. En journée,
rien, sauf le mercredi, Le juste prix (20 mn TF1) en fond sonore pendant le
repas. Mon audimat se décompose ainsi :
-TF1 : 3h20
-France 2 : 2h45
-France 3 : 2h
-Arte : 1h30
-M6 : rien
Je n'ai pas d'autres chaines.
Soit 1h20 par jour. Suis-je dans la moyenne ? Il est bon de faire se genre d'inventaire :
on s'aperçoit que nous sommes tout de même perméables aux fadaises (1h20 de Juste
Prix et Plein les yeux) malgré 4h15 d'émissions plus culturelles et 4h de
fictions. A noter que Bouillon de Culture et le cerveau de Ravel sont
celles qui m'ont laissé le meilleur souvenir.
Puisqu'on est dans les inventaires, la même semaine, j'ai consacré au travail
littéraire :
-Dimanche 6 mai : néant
-Lundi 7 mai : 1h
-Mardi 8 mai : 4h
-Mercredi 9 mai : 3h
-Jeudi 10mai : 1h
-Vendredi 11 mai : 7h
-Samedi 12 mai : 3h
Total : 19h, soit exactement le double que l'activité télévisuelle. Ouf, sauvé !
(23/05/2001)
La vie associative est étrange : organisée - président, secrétaire, bureau,
réunions - et désorganisée - rencontres, opinions, vagues projets, faudrait que....
Elle est faite de passion, essence même de son existence - pêche, foot, littérature,
plongée, resto du coeur, amicales, club - et se nourrit de découragements - on n'est pas
beaucoup, on na pas les moyens... c'est toujours les mêmes qui...
De temps en temps, les vagues projets prennent corps, on le réalise parfois brutalement
comme en ouvrant le paquet daffiches dun Salon du Livre organisé par
lAssociation des Ecrivains de Haute-Marne (étrange aussi le poids énorme de 300
affiches 80x60...).
On est étonné de voir les affiches si belles en livrée bleue rouge et dorée. La
manifestation prend corps, le gâteau a levé. Cest une réussite ! Merci à
Guy Chaudet, notre dessinateur, et à Gérard Paillot, notre graphiste, pour leur
excellent travail. On sera fier de proposer ces affiches à nos amis libraires et
bibliothécaires. Ce salon, on voudrait déjà y être... (16/05/2001)
Salon professionnel (orthophonistes) au Centre des Congrès de
Reims : létrangeté davoir un stand pour présenter Internet pendant ce
grand week-end de début mai. Heures dattente des congressistes en conférence,
cette connivence dans lennui avec les autres exposants.
La succession de rencontres comme les chapitres dun roman : léditeur
dun logiciel, son bavardage et ses gestes saccadés, celle qui me raconte sa
difficulté dexercer en psychiatrie, celle qui me parle de la Pologne, de San
Francisco et dun pont rouge ou comment ramener une batte de base-ball en inox, de
lInde et dun tremblement de terre, du commerce des olives, dun accident
entre une deux-chevaux conduite par son fils et une vache, - tout cela en un temps record
-, celle qui mexplique sa difficulté dexercer en psychiatrie, la
recrudescence des cas de psychoses, cette soirée aussi où tout le monde danse et boit du
champagne.
Tout un monde davant lécriture... ce qui constitue lessence même de
cette rubrique détonnements. (09/05/2001)
Par hasard au Club Med de Vittel ; cest dimanche
matin. Il pleut. Vu du cinquième étage du Grand Hôtel, la terrasse ruisselante et les
tables de jardins vert anglais dessinent une promesse illusoire de petits déjeuners
campagnards. La télé est allumée : sur Arte, il y a ce documentaire sur
Denise " ? " (jai oublié son nom, je me souviens
juste de deux prénoms accolés), qui a ouvert une galerie dart contemporain au
sortir de la deuxième guerre mondiale à Paris. Cest beau, elle parle de
Vassarelli, on ne se lasserait pas de lécouter. Je ne connais rien à lart,
à la peinture. Je suis assis sur le lit, la lumière grise de la pluie entre à gros
bouillons (tout à lheure, profitant dune accalmie, une armada de Gentils
Organisateurs formeront une haie dhonneur bruyante pour applaudir les nouveaux
arrivants), je voudrais lire La bataille de Pharsale de Claude Simon mais je me
suis laissé prendre par le documentaire. Je sens la couverture cartonnée et rugueuse
sous ma paume (une vieille édition rachetée à la Bibliothèque des PTT, Direction
Départementale de la Haute-Marne). Je me réjouis de reprendre la quête de Claude Simon,
cherchant dans la campagne aride le champ de bataille. Mais la télé. Je ne connais rien
à lart, je ne sais même pas qui est Denise " ? ". Allons
à la piscine ! Je détache ma paume du livre et jéteins à regret la
télévision. (04/05/2001)
Heure des comptes : un bon millier de bouquins (La
Réserve et Central) ont été vendus.
Quelque part, en partant de zéro et parfait inconnu jusquen avril en 2000, cela
rassure davoir presque autant de lecteurs.
Quelques réflexions cependant :
- le poids de la pub quand on voit les résultats (vantés) cent fois supérieurs de
" 99 F " de mon presque homonyme Beigbeder, roman qui dénonce
justement la pub
- à peu près le tiers de la diffusion environ a eu lieu dans mon département de
Haute-Marne (180 000 habitants, moins peuplé que Reims), ou à des connaissances, ce qui
caricature bien le désert de la distribution actuelle des livres en France ou le parfait
inconnu a peu de chance dêtre vu sur les étals des libraires. (25/04/2001)
Hier, 12 avril journée faste : Aubervilliers et la découverte incongrue et
émerveillée des jardins ouvriers aux portes du métro. Montreuil et le choc de la CGT
comme extraordinaire mémoire des hommes au travail (et non pas le travail des hommes car
lhumanisme est partout en ce lieu et dans les gens comme un fil conducteur). Des
images aussi glanées dans le métro, dans la rue et qui inspirent : on a
commencé une nouvelle (Vers Aubervilliers). (15/04/2001)
On tourne toujours autour de Central :
mon téléphone sans fil (celui que j'avais disséqué sur la moquette bleue dans le
chapitre 17...) a rendu l'âme, j'ai donc remis le bon vieux téléphone des familles S63
(également disséqué...) Hier matin, il a sonné pour la première fois : étonnement
devant le timbre depuis la cuisine où je déjeunais avec ma femme et ma fille - on se
souvenait plus que j'avais changé - mais tout de suite cette bouffée d'allégresse pour
moi du moins, le timbre associé à quelque chose qui vient de loin, à la fois sérieux
et gai, une nostalgie peut-être ? Toujours est-il que j'ai décroché avec sans doute
plus d'attention et d'écoute et plus de joie aussi. Poids du combiné, on dirait une
haltère, c'était la gymnastique du matin. (04/04/2001)
Il y a de cela quelque mois,
jai travaillé à la rédaction de pages touristiques pour lannuaire
téléphonique de la Haute Marne. Impression curieuse de ce travail à cheval entre mon
métier de raison, les télécommunications et mon métier de cur, lécriture.
Curiosité aussi dans la structure dun annuaire, véritable construction à la
Perec. (28/03/2001)
Sur le trajet qui mène à la
gare, il y a écrit TAIME en travers de la route. Il est 6h15, je marche vite pour
avoir mon train. TAIME en travers de la route à la peinture blanche. La route longe
la voie ferrée. Je vois les feux sur les quais. Rouge, arrêt obligatoire des trains. JE
a disparu. Lavé par les pluies sans doute. TAIME occupe toute la largeur de cette
route longeant les voies, de toute part TAIME est cerné par les flaques deau.
Il pleut sans discontinuer depuis plusieurs semaines. Dans les journaux télévisés, on
nous montre des gens, qui récurent, balayent, poussent leau de leur maison
inondée. TAIME a résisté. JE sest effacé. Et peut-être que cest
cela dans la réalité. Peut-être que le type qui a écrit cela est passé à
dautres amours. TAIME reste sur le goudron de la route. Le bitume qui est une
invention humaine retient ce qui existe depuis la nuit des temps, bien avant
linvention de la peinture blanche, des lettres capitales, de lécriture.
(21/03/2001)
" Mon fils me dit
tout à lheure :
- Tu sais que deux de nos vaches sont parties recemment pour la boucherie, es-tu au
courant de ce quelles sont devenues ?
- Des bêtes extra !
- Oui, mais sais-tu où elles sont allées ?
- Pas à labattoir habituel ?
- Si mais ensuite ?
- Chez un boucher qui fait du choix ?
- Non, elles font du ciment. Elles ont été retirées du circuit normal de la viande et
ont été emmenées dans une cimenterie où on les utilisera en tant quénergie
thermique... "
Ce texte débute la chronique hebdomadaire que tient depuis plusieurs dizaines
dannées Jean Robinet, 85 ans, fondateur de lAssociation des Ecrivains
Paysans, une trentaine doeuvres à son actif , Président dhonneur de
lAssociation des Ecrivains de Haute-Marne. Tout au long de son texte, on sent
lamertume dun homme loyal, dépassé par les évenements " qui
na plus que ses yeux pour pleurer ", qui revendique, comme étonné
de le dire " le droit dexister décemment ",
" dêtre heureux à la tâche ", un travail
" pour la fierté dune belle récolte ou dune belle
étable ".
Mon cher Jean, le temps est loin où tu écrivais ton premier roman " Compagnons
de labour ", en captivité pendant la deuxième guerre mondiale et sur un
papier de fortune... Lequel était le plus heureux pour toi ? (14/03/2001)
En Guadeloupe, rejoindre les sources du
Matouba sur Basse-Terre nest pas chose aisée. La route étroite traverse des
bananeraies infinies, se perd dans une coulée de boue, le goudron fait place aux pierres
dures et tranchantes. Puis un éboulement empêche daller plus loin, certainement la
trace dun cyclone survenu il y a quelques années. On arrête le moteur, on sort.
Silence. Oiseaux. Balisiers. Enchevêtrements darbres. Le pont traversé juste avant
na plus de rambardes, le Matouba qui coule dessous cache sous ses pierres les
ouassous et les écrevisses " caca dor ". On n'ira pas jusque
aux sources, jusquà Saint Claude. Joséphine, la propriété familiale de St John
Perse, est toute proche. Sous les feuilles, des fantômes centenaires récitent :
" mais pour longtemps encore jai mémoire de faces insonores, couleurs
de papaye et dennui, qui sarrêtaient derrière nos chaises comme des astres
morts ". (07/03/2001)
Jhabite au coin des rues Anatole
France et Jean-Jacques Rousseau. Lautre soir, à ce carrefour dangereux, un
accrochage a eu lieu. La police a du intervenir pour séparer les protagonistes, ceux qui
avaient surgi des chemins progressistes de la philosophie davec ceux qui se sont
engouffrés dans la rue rectiligne de la littérature... (14/02/2001)
42,2 % cest le score réalisé par la
Confédération Paysanne en Haute-Marne aux élections de la Chambre dAgriculture.
Si jen parle cest parce que la Réserve, mon roman paru en avril 2000,
portait sur lavenir de la ruralité dans ce département sur fond de crise de la
vache folle. Mais jen parle surtout car certains quotidiens oublient de citer la
Haute-Marne dans les résultats de Champagne Ardenne où on se gargarise de la FNSEA (75%
des voix), malgré les " coups bas " portés contre, dixit ce syndicat
tout puissant. Il est vrai quavec OGM et Prion, bientôt quand on nous tapera dans
les couilles nous naurons plus mal
(07/02/2001)
La révolution d'Internet, est-ce 1789
et suivantes ? Il est interessant de se poser cette question ; pour 1789, tout
de suite on voit lespace immense de la liberté, la Marseillaise, Les Droits de
lHomme. On élude les guillotines, la Terreur, la confusion. Marat, Danton,
Robespierre, Camille Desmoulins, qui étaient les bons, les méchants ? On a la manie
du classement et de lordre. Réfléchissons aussi à cela pour Internet. Bill Gates,
est-ce Danton ou Robespierre ? Qui tient le pouvoir ? Les patrons de Yahoo,
Voilà et autres moteurs de recherche ? Quest-ce que la
guillotine informatique ? Est-ce la censure ? Est-ce le silence (arrêter
son site web)? Est-ce emplir lespace virtuel de niaiseries commandées par des
médias ? Qui dicte les Droits de lHomme et de lInternet ?
(31/01/2001)
On se souvient avoir organisé lors du
premier salon de livre de Langres en avril 2000, un espace Internet sous une volumineuse
et magnifique affiche créé par Gérard Paillot pour loccasion et présentant Diderot
comme le précurseur de lInternet, histoire de donner aux habitants de sa ville
natale, une vision particulère du philosophe (et cest vrai quil y a de
linternet dans lexhaustivité de lencyclopédie, dans cet espace nouveau
de la description et des conséquences de vouloir recenser tout à la vue de tous).
Histoire den être un peu plus convaincu, je remercie Marcel Marty, conservateur de
la bibliothèque à lUniversité de Toulouse de mavoir envoyé cet extrait
visionnaire dune des Lettres à Sophie Volland de
Diderot :
" Voilà donc une de mes lettres perdues. Et qui sait ce qu'il y a dans cette lettre,
en quelles mains elle est tombée et l'usage qu'on en fera ? Comus ne perfectionnera-t-il
pas son secret ? Ce Comus est un charlatan du Rempart, qui tourne l'esprit aux
philosophes, et son secret consiste à établir de la correspondance, d'une chambre à
l'autre, entre deux personnes, sans le concours sensible d'aucun agent intermédiaire. Si
cet homme-là étendait un jour la correspondance d'une ville à une autre, d'un endroit
à quelques centaines de lieues de cet endroit ; la jolie chose ! Il ne s'agirait plus que
d'avoir chacun sa boîte. Ces boîtes seraient comme de petites imprimeries où tout ce
qui s'imprimerait dans l'une, subitement s'imprimerait dans l'autre ... Trêve de
plaisanterie, si Morphyse, si D'Amilaville ou M. Giller. Vous m'entendez. Après tout,
tant pis pour les deux premiers (...)" (28 juillet 1762)- mis en ligne le
24/01/2001.
Pourquoi ferme-t-on un
site ? Le site de Tanguy Viel nexiste plus. On garde juste la lettre
dadieu. Cest une décision réfléchie puisque lécrivain lors de sa
dernière mise à jour déclarait sinterroger " au sujet des bienfaits
dInternet " avec comme conséquence, soit la poursuite de son site, soit
la fin de celui-ci quand il aurait répondu à ses interrogations. Tanguy Viel a donc
choisi. Pour nous, la question quil a lancée persiste : quel avenir pour nous dans
Internet ? Cette question qui semble saugrenue de plus en plus, cest justement
parce quelle semble de plus en plus décalée quil faut se la poser. Et en
décliner tous les corrolaires : un site pour quoi y faire ? Permanent ?
Temporaire ? Cest individuel ? Cest collectif ? (comme le dit
TV : cest " un espace qu'on ne sait plus ni vraiment privé ni
vraiment public ". La perte de repères, induite, voulue, vantée dans
lessence même dInternet comme une liberté nouvelle tue-t-elle
(tutelle ?) celle-ci ? A nous dy réfléchir aussi. Toutefois sans
précipitation. (17/01/2001)
Le début dannée à chaque fois me
saisit : quon appelle cela bonnes résolutions ou autres, il y a à chaque fois
cette bascule peut être liée aux jours qui rallongent. En arrière on songe encore à ce
qui fut les mois précédents et londe de choc immense qui me poursuit encore comme
une vague : la parution de Central. (10/01/2001)
2001, nous y sommes. Et la furieuse et
bizarre envie de ne retenir que le 001, effacer deux mille ans. J'y vois encore une preuve
de mon indécrottable optimisme. L'homme à la mémoire courte. (03/01/2001)
"Etonnements", c'est une
rubrique d'actualité. Et l'actualité en ce moment, ce sont les fêtes de Noël et du
Jour de l'An. Parfois, on cotoye des gens qui ronchonnent : je n'aime pas les fêtes.
Parfois on ronchonne nous même. Mais bon, cette année, comme tous les ans, j'ai ramené
un sapin, mes enfants l'ont décoré avec joie. Noêl, c'est leur fête, ne la gâchons
pas. Et comme nous sommes tous de vieux enfants : bonnes fêtes à tous les lecteurs de
"Feuilles de route" ! (27/12/2000)
Finalement, pour l'histoire de ce prof
d'Abbeville, soupçonné de toutes les perversités pour avoir proposé la lecture de Le
grand cahier d'Agotha Kristof, c'est au moment que retombe la pression médiatique
qu'il faut continuer à être vigilant : justice, éducation nationale, c'est par ces
administrations, toujours balancées entre incompréhension de la marche du temps et
désir de tout légiferer et maîtriser que viendra le danger.
A lire, le dossier très complet dans remue.net de
François Bon. (20/12/2000)
Demande dinterview par le net
pour
Liberation Maroc ! Tout de suite on pense à Humphrey Bogart, en
costume blanc dans une rue ensoleillée de Casablanca, cigarette négligement coincée au
lèvres, feuilletant le journal qui contient mon interview, en attendant Ingrid Bergmann.
Les mythes ont la vie dure ! (13/12/2000)
On est à Paris : salon des
dentistes, foule internationnale, sourires commerciaux, brouhaha, fatigue, revenir tard,
lignes de métro en panne, réagir vite : passer autre part, le train nattendra
pas, bousculade, on force la foule, on se coince entre les portes des rames. On a son
train. Le lendemain, on entretient un verger : autour du feu, muscles fatigués, on
mange en silence avec les amis habituels, respiration : on regarde
léchappatoire du ciel, bleu, grand et revient parfois le claquement des portes du
métro. (06/12/2000)
Fête du Livre du Figaro dans les
salons de l'Hôtel de Ville de Paris : Tiberi, VGE, Philippe de Gaulle, généraux,
noblesse française, parisianisme. Coincé entre Beigbeider et Stéphane Bern, l'édifiant
sentiment d'être un extra-terrestre. (29/11/2000)
Premier roman, première intervention : ce qu'on est
fier d'inaugurer le cycle de Rencontres Littéraires de l'Université des Sciences
Sociales de Toulouse avec François Emmanuel, Leslie Kaplan, François Salvaing,
Marie-France Hirigoyen et Lydie Salvayre. (22/11/2000)
Mon Goncourt à moi, cest un village en
Haute-Marne, le village des deux frères Goncourt Emile et Jules, inventeur du fameux
prix. Il y avait foire aux livres : avec quelques auteurs haut-marnais, nous étions
installés dans des granges, locaux de fermes aimablement prètés par les habitants. Moi,
jétais dans le garage, à côté de la pompe mélange pour mobylette et
tronconneuse, sous une banderole " le contrôle technique, cest
ici " avec toute la journée ce formidable sentiment dappartenance
à ce coin perdu . Vive la famille ! (15/11/2000)
Parce quon a
écrit un livre qui sappelle " La réserve, haute-marne 2017 ",
parce quaux confins du département se construit un site de déchets nucléaires,
parce quon sait pertinement que les fossoyeurs du nucléaire attendent 2017 pour que
leur usine tourne à plein régime : on dit STOP et on fait un lien sur le site
anti-nucléaire BURE-STOP (08/11/2000)
Signature dans une librairie :
j'ai vu défilé devant mes livres sorcières, farfadets, monstres et squelettes. C'était
Halloween. (1/11/2000)
On regarde Duras enregistré de lémission
" 100 ans décrivains ". Avant, cétait Saint Exupéry
(Saint Ex, le raccourci quon emploie pour nommer le lycée voisin). Il est tard, au
moins Dix heures et demie du soir en été, le sommeil gagne. Je mélange Vol de nuit et
lAmant. Les lunettes de Marguerite englobent les yeux dAntoine. Les Carnets de
guerre chantent India song. Il y a un avion au fond dune gravière, tout près
dici. Lhélice effleure la surface de leau depuis soixante ans.
Détruire, dit-elle. Hiroshima, mon amour, répondit le Petit Prince.
(25/10/2000)
Le site Feuilles de route. Cela
fait un mois quil existe. On retient le principe dune mise à jour
hebdomadaire, le mercredi, avec au minimum une (ou plusieurs) note(s) de lecture, note(s)
décriture, les humeurs, réflexions en rubrique
" étonnements ", un lien supplémentaire par semaine
(" chez les autres "), de nouvelles critiques, articles de presse pour
les ouvrages parus (" la réserve " et
" Central ") et la mise à jour de lAgenda.Tout cela cest
de lécrit. Une centaine de connexion en 1 mois, certainement les 2/3 de mon fait
car cest avant tout un outil de travail. Merci à tous ceux qui sy plongent
avec moi !
(18/10/2000)
Le langage permet le
" je ", le sujet parce quil permet le jeu avec le monde, les
autres. Mais cela est possible seulement si le monde, les autres, ont déjà permis ce
rapport-là au langage (Leslie Kaplan)
(11/10/2000)
Honte à ce PDG, responsable du
plan social de DEVANLAY Saint Dizier (polos Lacoste, le crocodile) pour avoir posé
dun air suffisant devant le journaliste et déclaré : " nous avons
traité les ouvrières de façon à ce quelle puissent rebondir du mieux
possible ". Après six mois de lutte, les couturières des polos de joueurs,
auront ainsi atteint le statut de balles de tennis...
(11/10/2000)
CORA ROUTE DE BAR LE DUC
52100 SAINT DIZIER SAMEDI 30-09-2000 CAISSE 005 - CHIPS A LECHALOTT 8,50F -
PIZZA PATE FINE 13,50F SELECTION GRAI 27,60F MOUTARDE FIN GOURM 9,80F
PARTICULES ELEM 38,95F RAISIN NOIR 7,40 F TOMATES VRAC 11,70F. On achète
Houellebecq en version poche au supermarché, pré-digéré dans le ticket de caisse.
(04/10/2000)
Mon nom placardé à la bibliothèque,
lécole de musique et à la librairie avec une belle vitrine. Qui est ce type qui
dédicace un 30 septembre ? Etre lauteur dun livre, parfois on ny
crois pas, ce doit être un double.
(04/10/2000)
A propos dun passage de la
Réserve (laction se situe en 2017) dans lequel je citais une nuit, précisant
la date et la pleine lune, un lecteur sest amusé à vérifier la probabilité
quà cette date, dans 17 ans, il puisse y avoir pleine lune ! Preuve que ce qui
est dans les livres passe pour être vérité. Preuve que cette
" vérité " tisse un jeu subtil entre lecteur et auteur, une certaine
cohérence du rêve partagé.
(27/09/2000)
Un après-midi, j'ai
rencontré un de mes anciens collègues du central téléphonique. Nous avons bavardé
joyeusement en face de ma librairie préférée où mon livre Central est en
vitrine. Drôle de situation surréaliste : mon collègue figure dans un passage de ce
roman et le voir en chair et en os tandis qu'a dix mêtres de là, il vit également,
replié entre deux pages. Quelle pudeur aussi à parler de tout sauf de ce livre.
(20/09/2000)
Fête de l'Huma : on y
était hier ! Etonnements, oui, de retrouver autant de débats politiques, sociaux,
littéraires, de voir autant de visiteurs écouter, participer. L'impression, malgré la
fête avant tout et les flonflons dans tous les coins, qu'on pouvait se réapproprier le
monde. Au fait, qui nous l'avait piqué ?
(17/09/2000)
Aujourd'hui, entendu deux
nouveaux mots, horribles, lors d'une conférence sur les perspectives d'Internet à
l'horizon 2005 : dématérialisation et implants corporels ! Le premier désigne le fait
qu'Internet dans sa phase ultime du tout-communiquant appliqué à n'importe quoi,
téléphones portables, télé, radio, machine à laver etc... banalisera ,
"dématérialisera" toute communication entre humains. Le deuxième, implants
corporels, pour nous aussi devenir des machines communiquantes
dématérialisées !
(14/09/2000)
Je voulais faire un site le plus
simple possible. C'est fait : fond sobre, caractères sombres. Une page de bouquin en
quelque sorte. L'intérêt est de ne pas se casser la tête pour le fabriquer, mais aussi
pour le mettre à jour, ce qu'on va essayer de faire. Car le but est bien là, faire de ce
site une sorte de cahier de travail, mais surtout quelque chose qui soit partagé
entre vous et moi, sur la base des mille et un étonnements que procurent les choses de la
littérature.
(13/09/2000)
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