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Atelier d'écriture à Verdun
juin 2022
« Ateliers décriture, le
retour : voici la nouvelle session de printemps, organisée par la bibliothèque
départementale de la Meuse.
Lannée précédente, javais animé deux ateliers à Bar-le-Duc, lun
dans la très belle médiathèque de la ville et lautre au Centre social de la Côte
Ste Catherine. Je garde un excellent souvenir de ces deux expériences, moccuper de
personnes « éloignées de lécrit », comme on dit, mavait
littéralement vidé la tête des quelques problèmes ardus que je connaissais alors. Il
faisait beau, on portait des masques, on attendait lété dans loubli espéré
de la pandémie, mais rien ne pouvait nous éloigner du dynamisme et de la convivialité
que provoque lagencement des mots.
Jétais disposé à renouveler lexpérience, mais je voyais mon planning qui
se remplissait sans avoir de perspectives précises. Il y a deux semaines, on ma
proposé danimer deux groupes à la médiathèque de Verdun. Les séances déjà
étaient constituées : six sessions, deux chaque mercredi et jeudi après-midi
pendant trois semaines de suite. » (Note décriture du 23/05/2022)
Deux ateliers décriture en tension, donc, et ramassé sur peu de temps. Ils entrent
comme ceux de lannée passée dans le cadre du Festival de lécrit institué
depuis 26 ans par lassociation de lutte contre lIllettrisme Initiales.
Chaque milieu de semaine, sur deux après-midis consécutives, je reçois deux groupes.
Même pas le temps dappréhender cette précipitation et voici la fin du deuxième
jour.
Cest à la fois prenant et confortable à la fois. Usant aussi : Verdun est à
80 km de mon domicile, 320 km par semaine, 1h20 de route sinueuse pour chaque trajet, avec
la difficulté darriver en pleine digestion pour 14h (un repas léger simpose)
et le retour vers 18h30 après la fatigue de lanimation.
Mais prenant et confortable à la fois : les participants sont tous attachants et
sympathiques, le confort vient de cette dynamique mais également du faible temps qui
sépare deux séances : on peut se servir de lélan induit par la session
précédente.
Après un briefing auparavant avec Nathalie qui organise ces ateliers, je décide de
scinder chaque module en deux temps : le premier autour dune écriture
poétique, recopiée immédiatement et destinée à être affichée en temps réel à la
médiathèque, histoire de témoigner devant le public du « work in progress »
qui se passe en ces lieux (et cest aussi une excellente manière de valoriser
immédiatement les participants sans attendre le Festival de lécrit dont la
restitution aura lieu en automne). Le second temps décriture, commencé chaque
mercredi, est destiné à être approfondi le lendemain. La première semaine portera sur
lévocation du passé, la seconde sur le rapport au présent et la troisième sur la
projection des participants dans le futur. Enfin, cest lidée générale, car
latelier appartient en premier lieu aux participants et cest moi dêtre
attentif à valoriser lapproche de lécriture.
Mercredi et jeudi 8 et 9
juin 2022, première et deuxième séances :
A 14h, je fais connaissance avec les participants de mon premier groupe : 4 jeunes
issus de lécole de la 2ème chance, et 3 participants de lAmatrami
(association meusienne daccompagnement des trajets de vie des migrants ) deux jeunes
femmes péruviennes et un homme venu du Liban.
Le contact seffectue facilement. Nous nous présentons mutuellement et jai eu
lidée dapporter ma production livresque dans un panier, les livres y sont
moins impressionnants, et après tout, la lecture est une nourriture. En plus ça fait «
circuit court », en direct du marché !
Le premier exercice que javais prévu, une écriture sous forme dhaïkus, est
facilement compris. Tous participent, écrivent aisément, même si « google
trad » est utilisé pour une des deux péruviennes, moins à laise que
lautre. Tous lisent leurs textes et ce passage à loralité et la
présentation des textes aux autres est une étape à ne pas louper. Récréation bonbons
avant dentamer le deuxième exercice, basé sur lévocation du passé, il faut
du sucré, lécriture use de lénergie. Les phrases à base de « Je me
souviens » de Georges Perec, constituent une base idéale et les participants
déclinent consciencieusement leurs aphorismes.
A la fin de la séance, grande satisfaction et jai même retenu demblée tous
leurs prénoms : Alice, Enzo, Giovanna, Léa, Lucas, Nina, Walid.
Mais pas de temps à perdre, il faut déjà enchaîner avec le 2ème groupe à
16h30. Je retrouve 3 participants de lAmatrami, une jeune femme de Côte
dIvoire, une jeune fille albanaise et un afghan. Un autre groupe les accompagne, 6
participants de lADAPEI (Association départementale de parents et damis de
personnes handicapées mentales). 4 dentre eux ont déjà participé à des
précédentes éditions du Festival de lécrit). La séance dure moins longtemps,
aussi, nous navons le temps que de travailler sur les haïkus. Là encore sans
problème majeur : latelier est lancé dans sa totalité ! Pareillement, je
retiens demblée leurs prénoms : Antony, Eric, Hadi, Laurent, Mélody,
Salimata, Samanda, Stéphane, Yoan.
Le jeudi, je suis très fier de saluer chacun par son prénom.
Le premier groupe continue sa production rapide et poétique, mais cette fois, nous
travaillons sur les 5 sens, accompagné dun petit brainstorming pour nommer des
verbes qui se rapportent à chacun des sens. Puis nous reprenons les textes de « je
me souviens » pour les compléter où les améliorer.
Giovanna est absente, elle est mère de famille, seule avec 4 enfants.
Le second groupe est toujours aussi sympathique avec les participants du CAT qui
ségaillent dans les rayons de la médiathèque avant la séance. Melody est
absente. Cette fois, je ne propose que le texte à base de « Je me souviens »
que nous navions pas eu le temps daborder hier. Chacun écrit
consciencieusement et là encore, je prends soin de faire lire les textes des
participants. Nous avons travaillé en profondeur sur ce seul exercice mais cest
préférable. Souvent je travaille trop vite sans prendre la peine dexpliquer.
Ainsi ce termine le premier tiers de cet atelier qui va passer, je le sens, à la vitesse
de léclair.
Mercredi et jeudi 15 et 16 juin 2022, troisième et quatrième
séances :
La seconde semaine de ces ateliers est placée sous le thème du
présent. Exit les souvenirs évoqués la semaine dernière, on est dans limmédiat,
la sensation imminente, le sentiment actuel, la réaction à chaud, une autre manière de
décoincer lécriture
Mercredi, la salle associative de la Danlie, neutre et banale, incite à la concentration.
On commence avec le premier groupe à évoquer les orages qui ont détraqué les chaleurs
des jours précédents. Jai repris le thème des haïkus et jai, dans mon
escarcelle, quelques exemples japonais sur la pluie, le vent et toutes les manifestations
de la météo. Chacun évoque ses impressions, peur devant les éclairs, ravissement
devant le fracas, des écrits qui veulent dire « quelque chose bouge enfin ».
Ces poèmes, destinés à être affichés à la médiathèque, vont remplacer, compléter
ceux de la semaine précédente.
Autre exercice destiné à rendre compte du présent, de ce quon voit, de ce qui
existe au moment où lon parle : écrire à partir de la locution « Il y
a ». Je distribue des poèmes où cette locution est souvent utilisée (chez
Rimbaud, par exemple) mais on peut aussi sinspirer de la chanson de Vanessa Paradis.
Les deux groupes se réunissent comme la semaine dernière, tour à tour, et je constate
avec plaisir que je connais déjà beaucoup deux, leurs manières touchantes de
réagir et décrire.
Le lendemain, on continue encore avec le présent, cette fois à la médiathèque, lieu
plus propice à linspiration et plus chaleureux aussi. Jai apporté des livres
de cuisine, car cest cet axe que jai choisi pour explorer le présent. Je
parle dInstants cuisine, de notre travail avec lami Alain Delatour et
de notre exposition, encore en cours à Donchery (note décriture et webcam du
16/05/2022). Chacun se colle à écrire une recette où à dépouiller lalphabet des
termes de cuisine, bref, cest vivant, très gai. Cest aussi ce jour où un
employé sympa de la médiathèque utilisera ma caméra, ce qui me permettra de réaliser
après coup ce petit film.
Mercredi et jeudi 22
et 23 juin 2022, cinquième et sixième séances :
On avance, on avance
En toute
logique, dans cette dernière semaine, cest le thème du futur qui sinvite
après le passé et le présent des fois précédentes.
Pour cela jai préparé des poèmes qui mettent en jeu le futur (exemple, Victor
Hugo : « Demain, dès laube, à lheure où blanchit la campagne, je
partirai
»). Il est important pour moi de montrer comment les écrivains se
servent des sujets sur lesquels nous travaillons, de relier leur propre écriture avec des
auteurs, fussent-ils les plus prestigieux. Cela donne parfois des formes surprenantes,
amusantes parfois comme lorsque lun des participants rédige son programme politique
de futur président de la république ! Mais pour les participants étrangers,
cest aussi un excellent moyen de se familiariser avec nos conjugaisons difficiles.
Le lendemain, après laustère salle de la Danlie, nous voici à la médiathèque,
où je retrouve avec plaisir Camille Brunel, en résidence avec des classes de 6ème.
Hélas, nous aurons peu de temps pour échanger : qui a dit que les ateliers
décriture étaient un lieu de repos pour les écrivains (personnellement, à la fin
des deux groupes consécutifs, je suis vidé
Et il me faut accomplir une heure et
demie de route pour rentrer
). Cette dernière séance est consacrée au très beau
« livre des questions » de Pablo Neruda, manière poétique de se poser des
interrogations sur notre propre futur, par présent interposé. Bel échange avec les
participants pour évoquer comment on pose des questions au Pérou, en espagnol, ou en
portugais, et même en albanais. Nous avons tant à apprendre les uns des autres. Lors de
cette ultime séance, je restitue à chacun des présents les textes que jai pris
soin de recopier (ça fait partie du job). Nous choisissons ensemble ceux quil
convient de proposer pour la 26ème édition du Festival de lécrit qui
aura lieu en automne.
De cette expérience ramassée sur trois semaines, je garde un
excellent souvenir. Jai limpression que les deux séances hebdomadaires, très
proches, ont favorisé lécriture : pas le temps de se reposer pour eux, on
garde une cohérence densemble, et, pour moi, de même lidée de battre le fer
tant quil est chaud. Dans les jours qui suivront ces deux ateliers de Verdun,
jenverrai aux animateurs les textes des participants, les photos et le petit film que jai conçu. Cette
manière rapide dagir, un mois au total pour 6 séances et 16 participants
maura bien occupé. Si chaque séance dure 2 heures (donc 4 pour les deux groupes)
il faut doubler ou tripler ce temps en préparation, élaboration des séances, en
formulaires, recopiage des textes, scans, photocopies, tri des rushes caméra, photos,
élaboration du film et divers...
Et rajouter ainsi aux six « demi » - journées de 8h (départ 12h et retour 20h) un
équivalent dune dizaine de jours de travail.
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