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Vie prolongée de l'auteur (pas lui,
moi) Avant l'histoire même du livre, probablement faudrait-il remonter à sa préhistoire, les marques fossiles du poète imprimées dans ma mémoire : une centaine d'occurences du nom Rimbaud disséminées dans mes pages de Feuilles de route, des voyages par dizaines à Charleville ou dans ses Ardennes, au gré de mon travail, mais toujours assorties de pensées, visites au cimetière, au musée, à Roche. C'est un familier : entendez par là, qu'il est entré en moi comme un parent proche, une sorte d'oncle invisible, un cousin germain.Visites donc, assorties de photos : Dans l'affection et le
bruit neuf ; Rimbaud, le retour ; Rimbaud ou la politique, il faut choisir ; Par osmose, Rimbaud est ainsi entré dans le sang de mes livres : on trouve dans CV roman (2007) le CV de Rimbaud ; le VRP d'Ils désertent (2012) est un passionné du poète et la couverture de ce livre porte jusqu'à son empreinte ; Faux nègres (2014) est un titre emprunté à Arthur, et j'en parle même à la radio.
Attaquer de front, donc, cette vie prolongée : l'idée nait le 22 octobre 2014 (date anniversaire de Georges Brassens, grand admirateur de Rimbaud), j'ai eu la présence d'esprit de le noter sur le fichier numérique qui m'a tenu lieu de manuscrit. Savoir aussi qu'à cette date, Arthur avait 160 ans et deux jours. Mais l'idée sans doute me trotte depuis longtemps, depuis que l'ami peintre Alain Delatour (voir notre projet commun texte et peinture Instant Handball expositions, livre - nous allons en reparler bientôt) m'a offert ce portrait de Rimbaud vieilli, pas commode, et comme je m'étais ouvert de cet air maussade, Alain m'avait répondu : "C'est sûr, s'il était revenu dans les Ardennes, il aurait fait la gueule..." : tout cela fait son chemin, et ce n'est pas un hasard si la très belle couverture du livre est inspirée du tableau.
Feuilles de route, comme d'habitude, m'aura servi de journal d'écriture, un peu lâche il est vrai en 2015, il faut attendre cette année pour que soit nommé le récit en son nom de code VPAR et la fin de la rédaction pour que, paradoxalement, je laisse libre cours à ma joie. "Jai commencé un texte nouveau" "Multiples projets : un récit en octobre, un autre qui sannonce avec
enthousiasme" "Cest un autre roman (celui doctobre) qui sachemine avec une
relative régularité. Régularité bien obligée puisquil se dessine déjà comme
un gros pavé." "Les Ardennes me sont chères en ce moment, le récit sur Rimbaud que je prépare
y est pour quelque chose." "Le livre que j'écris depuis un peu plus d'un an est un chantier au long cours,
qui s'apparente à un ultra marathon (on en revient toujours à la course à pied), les
500 pages sont en vue et le machin n'est pas terminé, j'ai en ligne de mire une arrivée
triomphante pour mars-avril." "Projet qui me tient beaucoup à cur, le livre en écriture (nom de code
VPAR), son voyage de bateau ivre au long cours, mieux quune traversée, un tour du
monde puisquil dépasse probablement 500 pages au bout de 14 mois de rédaction, et
la terre nest toujours pas en vue
" "Bon quà ça : fameuse phrase de Beckett à propos de sa seule appétence à écrire. Je ne pense pas être aussi exclusif, ou plutôt, cette exclusivité décriture aura été mienne pendant seize mois et trois jours, le temps quil ma fallu pour rédiger un gros livre au sujet de Rimbaud, nom de code VPAR, entrepris donc le 22 octobre 2014 et terminé le 25 février 2016. Au début bien sûr jai commencé mollement et jai pu lier dautres écritures, activités diverses, mais plus le temps passait, et plus le livre me tenait au corps, grossissait. Les six derniers mois, quasi cinq cents pages se sont rajoutées au deux cent cinquante produites alors, les deux cents dernières depuis 2016 et le sprint final denviron cent pages concocté en une dizaine de jours : bon quà ça donc, dans tous les instants libres que moctroyait ma vie, dans ce délice dy penser nuit et jour, en voiture, au boulot, en imagination toujours, au point où depuis des lustres je ne pense quà travers lan zéro après AR (Arthur Rimbaud), date à laquelle commence mon roman. Bref, tout cela nous emmènera maintenant vers la rentrée littéraire que jattends avec impatience."Note d'écriture du 08/03/2016. "Boucler un livre : lexpression pour moi à souvent pris un tour rigoriste : jaime quand mes livres « bouclent », cest-à-dire quils accomplissent un parcours tel que le premier mot du titre choisi soit celui de lincipit, et bien sûr que le dernier mot du récit, soit le dernier du titre ; habitude prise depuis Central, seize ans auparavant, continuée souvent : Retour aux mots sauvages, Faux nègres, Journal de la canicule. Celui que je projette pour septembre devait de même boucler, mais jai pris la liberté de changer la fin, et, du coup, le nud devient lâche, le lacet se défait, on marche dessus et on trébuche. Pour ma plus grande joie et conscience, cela dit : les règles sont faites pour être transgressées, et si la littérature ne vous fait pas trébucher de temps à autre, elle ne sert à rien. La joie donc, immense dun nouveau livre et tout ce qui va se préparer une fois le texte remis : relecture, corrections, maquette de couverture, argumentaire, rencontres, service de presse, photos à faire pour la promotion, je retrouve avec plaisir tous ces préparatifs. Il y a du boulot en perspective : la longueur du texte, le triple dun roman habituel, apporte une contrainte supplémentaire. Finalement, boucler un livre, cest tout ce travail collectif que jadore." Note d'écriture du 22/03/2016. "Mon texte remis récemment à léditeur compte exactement 780 937 signes. Jusquà présent, javais une méthode très simple pour mesurer lavancement dun livre : une page égale à peu près mille signes. Par exemple, Ils désertent qui compte 245000 signes compte 252 pages pour le roman proposé par Fayard. Ceci dit, le dernier Journal de la canicule, rédigé avec 270000 signes, possède un nombre de pages quasi similaire (255) pour une pagination et un format identique. Tout dépend des espaces entre les paragraphes, des chapitres, des dialogues, tout ce qui laisse de grands blancs dans les pages. Avec 780 000 signes, jétais en droit de compter sur un bouquin approchant les 700 pages, voire les dépassant, à en juger par le plus gros que javais écrit jusquà présent, Faux nègres, fort de 422 pages et 455 000 signes.Or, quel ne fut pas mon désappointement en apprenant que mon éditeur, pour une raison pratique, a décidé de publier le livre dans un format légèrement plus grand. Du coup, la pagination va sen trouver réduite puisquune page de grand format comptera plus de signes : au maxi, 35 lignes et 55 signes par ligne en grand format, plutôt que les 30 lignes et 45 caractères habituels. Dit autrement, 1925 signes par page au lieu des 1350 habituels. Attention, ces chiffres sentendent page complète, chaque ligne dûment remplie, sans compter les retours à la lignes, sauts de paragraphes etc. On voit donc bien que je nétais pas loin avec les 1000 caractères par page en format normal. Dans le nouveau format plus grand, ce sera probablement en moyenne 1500 signes, donc mon livre devrait donc se réduire à environ 500 pages, doù ma frustration, moi qui ait claironné à toute la terre que javais écrit un bouquin de 700 pages Et en lecture, ça représente combien dheures ? Et bien ma bonne dame, mon bon monsieur, (je fais les questions et les réponses) si on compte à peu près une minute et demie à deux minutes par page, ce qui est mon rythme, ça doit représenter plus de vingt heures de lecture. Prévoyez donc quarante jours si vous lisez une demi-heure le soir avant de dormir, beaucoup moins si vous êtes un adepte de la lecture diurne, côté canapé, avec bière, cacahuètes et deux heures devant vous, voire une journée et une nuit blanche si vous êtes un stakhanoviste des lettres, ou si le sujet vous paraît tellement palpitant que vous voulez savoir le plus vite possible qui cest qua tué à la fin. Finalement, vu de mon côté, écrire cest fabriquer du temps : les seize mois et trois jours quil ma fallu pour rédiger ce livre ont abouti à vingt heures dune sorte despace-temps que je vous donne, faites en ce que vous voulez." Note d'écriture du 04/04/2016. "Bon, VPAR est lancé, le livre paraîtra pour la rentrée littéraire, les grandes manuvres vont commencer, réunions des « représ », comme on dit chez mon éditeur, tournée des libraires, services de presse, tout cela avant lété. La « couv » (encore du jargon éditorial) est choisie, elle sera très belle et intrigante, je vais affiner le texte directement sur épreuve, du boulot en perspective, très grands plaisirs à ces préparatifs."Note d'écriture du 26/04/2016. "Découverte des premiers exemplaires de VPAR en édition hors commerce réservée au service de presse, mais qui préfigurent le livre terminé : youpi, la couverture est magnifique ! On ne verra que ce livre sur les étals. Service de presse donc, entrecoupé par un exercice incendie où tout le monde sest retrouvé sur les trottoirs, encore un beau prétexte pour moi de voir combien la chaîne du livre est variée et fait vivre du monde. Enfin, départ pour Lyon et diner le soir avec une cinquantaine de libraires"Etonnements du 30/05/2016. "Vie prolongée dArthur Rimbaud :
il est temps de dévoiler ce qui est annoncé depuis longtemps dans mon site sous
lacronyme VPAR : même François Bon
en parle dans son Service de presse
Et puis, justement, le service de presse
proprement dit, envoi du livre aux journalistes et divers professionnels du monde des
livres en avant-première, a été effectué une semaine auparavant. On continue en ce
moment la promotion avec Fayard (voir agenda ou page daccueil), puisque je participe
avec mon éditeur à la rencontre cette fois-ci de libraires dans un véritable tour de
France avant lété. Bref, Vie prolongée
dArthur Rimbaud est lancé, parution officielle le 17 août, il est temps
pour moi de prolonger cette vie du roman à venir par la rubrique spécifique habituelle,
destinée à renseigner sur lhistoire de ce roman, à rechercher les premières
traces de VPAR dans ce site, et à donner
quelques clés de lecture concernant le célèbre poète. Cest important pour
moi de retracer le trajet du livre : lécriture au long cours fait parfois oublier
les péripéties, on est comme un marin qui touche au port, oubliées les longues nuits de
veille, les incertitudes sur les chemins à prendre. Chaque ouvrage bien sûr est
différent. Je garde le souvenir du précédent (Journal
de la canicule) comme dune facilité : tout dabord ce livre
navait pas participé à la rentrée littéraire de septembre, sétait
constitué de fait au début de lautomne, en un mois. Ajoutons à cela une écriture
déjà ancienne, javais juste terminé laboutissement dun roman déjà
constitué au trois-quarts, on comprendra que mon implication était moindre, sans commune
mesure avec VPAR, ou Faux nègres paru en 2014 et qui sortira en poche
au même moment que « mon Rimbaud » (on en reparlera). Faux nègres, donc, avait été plus complexe dans
son élaboration, je garde la trace dun livre exigeant, plus difficile à structurer
que celui que je propose maintenant. Cela tient à la manière dont le livre se bâtit, la
profusion de personnages et le caractère moins linéaire de lintrigue. Ici, il
sagit de prolonger la vie de Rimbaud, cest donc un récit chronologique qui
sest constitué au fil des mois, le récit le plus long que jai jamais écrit,
qui aurait dépassé 700 pages dans le format de Faux
nègres (fort de 422 feuillets), mais qui se ramène à 415 (beaucoup moins effrayant,
nest-ce pas) avec le miracle dune dimension à peine plus grande. Le récit du
récit donc, au cours des seize mois décriture (et trois jours), mapparaît
au final comme très fluide, sans temps mort, avec une tension de plus en plus grande au
fur et à mesure de lécriture (savoir que les cent dernières pages le quart
du livre - ont été écrites en huit semaines). Peu de problèmes existentiels aussi,
lhistoire sest bâtie avec naturel dans la volonté excitante dimaginer
une suite à la vie du poète. Le fait de navoir rien de ficelé au départ,
davoir suivi en quelque sorte la « liberté libre » dArthur sans
savoir ce quil en deviendrait, a rajouté à mon plaisir : un mois avant la fin
de la rédaction, je navais même pas choisi la date de (deuxième) mort de Rimbaud
et comment il trépasserait
Cest un livre important pour moi : il fallait
bien que jen finisse un jour avec mon obsession rimbaldienne (Ils désertent, Faux nègres en font un personnage
à part entière). Il me fallait prendre le mythe à bras le corps et combattre ce VPAR aux poings (comme aurait dit Hervé Bazin,
admirez le jeu de mots). Je pensais au départ répondre à un vague désir
déclairer cette marotte, au final, après 129 000 mots et 780 000 signes
tapés comme un sourd sur mon clavier, je maperçois que je nai fait
quajouter un destin supplémentaire au poète (destin fictif auquel je crois
désormais dur comme fer, plus vrai que nature) et ainsi ajouté au mystère. Cette
rubrique, bien entendu, va sinscrire dans la celle spécifique de « mon
Rimbaud », qui est aussi pour moi une autre manière de nommer ce roman."
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