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Étonnements 2023
Hiver, morte saison. Dans lambiance effrénée des fêtes
qui se préparent, des ultimes arrangements avec lannée qui se termine,
lexpression « morte saison » paraît bien inappropriée. Il faut
remonter aux temps des potagers et des travaux agricoles pour que cette périphrase
hivernale prenne tout son sens, la terre labourée qui se repose en attendant les
semailles, le bois des arbres dénudés empilé dans les remises, toute une série
dimages rustiques qui nous viennent à lesprit en attendant la neige et son
blanc manteau.
Hélas, les années passent et le réchauffement climatique disperse le blanc manteau
ailleurs (ici, la dernière journée neigeuse date de presque 5 ans, le 23 janvier 2019). On délaisse les potagers :
plus assez deau pour arroser les légumes. Dans les champs fleurissent les
éoliennes. La méthanisation draine, en même temps que ses odeurs, son lot de
vocabulaire adapté : biomasse, déchets recyclables, transition énergétique.
Lactivité des humains change : on recharge sa voiture électrique, on trie ses
poubelles, on fait attention à tout, à sa consommation et au migrant qui débarque. La
guerre en Ukraine senlise, la bande de Gaza est dévastée, on attend la prochaine
actualité réjouissante. Les extrêmes de tous bords ont un sourire carnassier, nous, on
se contente de diminuer la viande aux repas, mais à Noël, les parc à huitres seront
dévastés comme dhabitude.
Bref, ce qui ne change pas, ce sont nos propres contradictions. Ainsi la morte saison,
emplie de gesticulations vaines, dattentes fébriles.
Morte saison dautrefois : je pense à quelques aïeux, nés dans des campagnes
entre Bourgogne et Jura. Je les imagine en hiver, dans les soirées ombreuses au coin de
lâtre, la vraie neige au dehors foulée par les loups (dont la disparition et
encore moins le retour étaient impensables), les femmes tricotant ou reprisant des
vêtements usés, les hommes réparant des outils ou assemblant des comtoises à
balancier, ce qui donna peut-être lidée à mon arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-grand-père de monter à
Paris, de sy établir comme horloger et de devenir suffisamment proche de Louis XVI
pour le suivre lors de sa fuite à Varennes.
On le voit, la morte saison nest quune question de regard, politique
évidemment, comme lest toute chose. Je voulais écrire une chronique paysanne à la
Jean Robinet,
quelque chose de bucolique, de doux et de sage, mais le monde change
(21/12/2023)
Jai participé récemment à une « Nuit de
lécriture » au lycée Marie de Champagne à Troyes. Lidée était de
regrouper des volontaires aimant la chose écrite après les cours à 18h30 et de les
amener à débuter une courte nouvelle. Lensemble des écrits devant être réunis
ultérieurement sous forme dun recueil, si le succès était au rendez-vous pour
cette toute première initiative.
Quatorze lycéens ont ainsi investi le CDI à lheure où celui-ci aurait dû être
fermé. Ambiance étrange dans la nuit qui désormais tombe à 17 heures. Lexercice
devant durer 3 heures, tous avaient apporté de quoi se restaurer avant de plancher sur sa
feuille ou devant son écran dordinateur. Cette décontraction a favorisé une
ambiance semblable au fameux film Le cercle des poètes disparus, chacun se sentant
lâme dun conspirateur secrètement engagé dans un défi.
Pour les aider, la directrice du CDI, deux professeurs de français et moi-même. Mon
rôle, comme celui des enseignants, était daccompagner chaque participant, de lire
par-dessus les épaules, dencourager, daider à démarrer, à formuler, bref,
tout ce que je pratique au quotidien et que jadore partager.
Pour démarrer, idée géniale de Marie : proposer un incipit. Trois ont ainsi été
écrit au tableau. Ceux, célèbres, dAnna Karenine, de Tolstoï (« Toutes
les familles heureuses se ressemblent, mais chaque famille malheureuse lest à sa
façon »), dAurélien, dAragon (« La première fois quAurélien
vit Bérénice, il la trouva franchement laide. ») et enfin, moins immortel, le début de
mon roman Ils désertent (« Maintenant que le camion est parti, la femme
pourrait ouvrir la portière de sa voiture, sinstaller et démarrer. »).
Chacun a ainsi adopté « son » incipit et linstant magique a démarré,
celui ou lauteur en herbe se réfugie dans sa bulle, stylo aux lèvres, yeux au
plafond, recueilli sur sa feuille. Le CDI, qui regorge de coins plus ou moins secrets, a
achevé de disperser les participants, certains préférant sisoler dans un univers
propice à linspiration, soit tout seul dans une salle, sur un canapé, assis par
terre et dos au mur ou recroquevillé face à une vitre aveugle. Lunivers de
lécriture débute dabord par un rituel, une position, des habitudes à
acquérir, propices à laisser les idées et les mots saligner. Je ne connais rien
de plus intime, de plus individuel, que le cérémonial décriture et je remercie
infiniment chacun de mavoir accueilli dans leur petit univers, de mavoir
laissé lire leurs mots, les interroger, bref partager toutes les préoccupations, les
hésitations, les fulgurances qui nous réunissent dans lalignement des phrases.
Au bout de 3 heures, chacun avait trouvé son histoire, son style, sa manière. Bien-sûr,
les textes nétaient pas terminés pour la plupart, mais lidée dun
recueil, incertaine au départ, sest affirmée. Oui, il faut regrouper ces petites
nouvelles et valoriser cette écriture sur le vif, « à contrainte » (que
naurait pas renié Georges Perec), faire en sorte que le fruit de cette Nuit de
lécriture existe.
(08/12/2023)
Jai la chance davoir à 20 km de chez moi un
festival assez couru concernant la photographie animalière. Je men suis déjà
ouvert plusieurs fois dans FdeR. Cette année, cétait la 26 ème édition et
comme à chaque fois, plus de 40 000 visiteurs ont admiré les clichés. Cette
édition était cependant particulière pour moi. Hormis Vincent Munier et son éditrice,
amie de ma fille, je connais peu de photographes de nature.
Or, cet été, le hasard a voulu que nous rencontrions au fin fond de la Colombie, les
parents dOlivier Larrey, photographe et parrain du festival cette année. Nous avons
sympathisé et ils sont venus chez nous pour rendre hommage au travail de leur fils
aîné. Bien leur en a pris, le succès du fiston a été total, hormis la magnifique
exposition à Montier, la projection de son film Laffût aux loups a
fait salle comble à Saint-Dizier avec 1100 spectateurs réunis en une seule séance.
Car Olivier a observé depuis un affût en Finlande une meute de loups. Il faut mesurer
lexploit de ce long métrage dune heure trente, où deux protagonistes, le
photographe et un aquarelliste superbe ont partagé un local sommaire de 8 m2 pendant 80
jours (en fait ils étaient 3 avec le réalisateur/caméraman du film). On ne
sennuie pourtant pas une minute dans cette ambiance de monastère. Ce film est de la
trempe de La Panthère des neiges de Vincent Munier et Sylvain Tesson (Note de lecture du 18/01/2022). A noter aussi
le très beau documentaire de Jean-Michel Bertrand encore disponible sur Arte, Marche
avec les loups.
(04/12/2023)
Je ne sais pas pourquoi mon bureau est en bazar. Ou plutôt, le
bazar, dans son acception orientale, correspond bien à létat de ma table :
une accumulation, non pas millénaire comme dans les souks de Damas et dAlep que
jai visités, mais qui se compte tout de même en années. Par exemple, à ma
gauche, un étui de montre de couleur bleue, de marque Yema, récupéré dans une armoire
avant que je vende la maison de ma mère, ça date dune quinzaine de mois. A côté,
un étui en plastique, contenant des clés, trouvé au lavage habituel de ma voiture, il y
a quelques semaines ou un sachet de thé « Charlotte », destiné à un cadeau,
et que je nai jamais envoyé : jai dû lacheter au printemps. Cette
mémoire des objets est assez facile à comprendre et à appréhender pour ces exemples
précis. Ce qui lest moins, cest pourquoi, ils ont atterri là, plutôt que
sur létagère à thé, dans le garage ou à lintérieur dune armoire.
Cest comme si le lieu où jécris en permanence (en ce moment dailleurs)
devait collecter toute cette somme avant de lengloutir dans le corps numérique de
lordinateur, une aimantation semblable à lattraction dun trou noir
céleste, en tout cas, cest limage qui me vient.
Si je poursuis linventaire de mon bureau, il serait presque impossible den
dresser une liste précise, ou disons que beaucoup dobjets perdent une explication
rationnelle : pourquoi ces stylos à 10 cm de ma main qui frappe en ce moment au
clavier ? Quand-sont-ils apparus, de quel tiroir, pot à crayons, de quelle autre
pièce de la maison ont-ils été déplacés ? Ont-ils un rapport avec le vieux
recueil de mots fléchés (août 2018) que je complète entre deux tâches et que
jai sorti de ma valise au retour de la Colombie ? Il y a aussi un petit
bloc-notes avec un contact important que javais perdu et que jai récupéré
sur mon ancien téléphone. Dessous, il y a la copie annotée dun article quun
vieux voisin ma glissé dans la boîte aux lettres au sujet dun réparateur
dhorloges (pourquoi ma-t-il déposé cela ?). Il y a létui de mes
lunettes de soleil (avec les lunettes dedans) : je sais que cest toujours sur
mon bureau que je les cherche en premier.
Tout cela est à ma gauche, empilé sur les bouquins divers, un atlas historique, une
étude de H.P.Jeudy et M..C.Galéra, dont jai fait une note de lecture le
21/04/2023, le numéro 1 de la revue Lâme au diable (également recensé le
20/03/2022), il y a aussi le gros bouquin noir dEric Chevillard (LAutofictif
ultra confidentiel) qui squatte cette table depuis au moins 5 ans. Il y a aussi le
carnet de notes dont je me suis servi pour J (et qui servira peut-être -sans
doute- pour sa suite ou pour dautres textes ). Il y a aussi dans cet agrégat
de livres, Doggerland dElisabeth Filhol, que je tiens en grande estime (note
de lecture du 07/01/2019).
Il y a aussi ma propre production sur le coin gauche de mon bureau : mes 16 romans
empilés par ordre chronologique (cest immuable), le plus ancien (La Réserve,
édition 2000) sur le bois du bureau et le plus récent (Dernier travail, 2022)
posé en haut de cette pyramide semblable à un cairn à 35 cm de haut (mesuré à
linstant grâce à la règle métallique située derrière mon ordinateur.
Si on circule de gauche à droite, on trouve également des gobelets en tous genre (celui
de La fête de lHuma voisine avec celui du Lions Club), une tasse offerte pour mes
60 ans (euh
il y a 5 ans de cela), un mug Franz Kafka, cadeau de ma chère et
tendre, lorsquelle est allée à Prague, un porte bougie en plâtre décoré
dune petite vache auquel je tiens beaucoup, cadeau de colonie de vacances de mon
fils, ça fait un baille. Et puis un panier dosier avec des agobilles dedans (comme
disait le grand-père de ma femme), une gourde deau du cinéma Le select
ramenée en juin dernier après une projection de LHomme-debout, un chat
égyptien en plâtre (voyage de 2001), beaucoup tombé et beaucoup rafistolé, des
ciseaux, une tasse de Rimbaud, lensemble encombré de crayons, de tournevis, de
plumes ramassées, de bouchons de champagne, de vis, de marrons, de pièces, galets, une
obsidienne dune île éolienne. Il y a des encriers vides ou pleins, ma bouteille en
balsa pour boire et le fatras des lettres et cartes postales que je reçois, programmes de
théâtre, photographies, billets étrangers, dossards de courses à pied
La
corbeille à courrier déborde de prospectus périmés, magazines, articles, catalogues.
Il faudrait trier tout cela.
Il me semble que lorsque jécrivais Sur
Ivan Oroc ici-même, dans la léthargie du confinement COVID, le bazar
navait pas commencé. Il sest constitué au fil des trois années qui ont
suivi, comme une sorte de refuge dans la vie trépidante qui est la mienne (ou plutôt,
comme diraient mes enfants, dans le syndrome dhyperactivité que je leur ai
généreusement refilé). Jajoute ainsi une tâche de plus : je promets de
ranger bientôt mon buzard (contraction de bureau et bazar), mais en faisant attention car
« Les choses ont une vie bien à elles ; il faut réveiller leur âme, toute la
question est là. » (Gabriel Garcia Marquez, Cent ans de solitude)
(note rédigée le 22/09/2023, depuis le bureau a été rangé, ça ne se voit guère)
(23/11/2023)
Deux mois et demi sans mise à jour. Il
mest arrivé dans la vingtaine dannées dexistence de Feuilles de
route (je suis un dinosaure du web) davoir de tels éloignements de la toile,
mais il me semblait quil sagissait plutôt dune lassitude. Ici, point
détats dâme, simplement la vie qui a filé tellement vite depuis le retour
de la Colombie. Jai toujours poursuivi lidée dune mise à jour
hebdomadaire qui cest traduit bon an mal an à une trentaine de mises à jour,
plutôt vingt ces dernières années, mais plus de deux mois sans signe de vie est rare.
Et cest ennuyeux pour moi : FdR sert à baliser ma vie, et me tient lieu
de mémoire personnelle.
Que sest-il donc passé dans ces dix semaines pour méloigner autant de
mon ordinateur ? Dabord, je ne men suis pas éloigné tant que cela. Le
roman au nom de code J ma occupé pendant un mois, relectures, corrections,
retouches, manuvres éditoriales, tout ce qui sied à un livre en voie
dachèvement. Divers voyages (Avignon pour un mariage, Bruxelles (2 fois) pour
aménager/déménager une maison, Paris pour mettre au point le DVD de LHomme
debout avec la réalisatrice Florence Vignon, puis Troyes, Chaumont, Charleville,
Reims et Bar-le-Duc pour un festival de lécrit en tant que président de jury, sans
oublier Nancy pour des activités lionesques, accompagné de diverses réunions, puisque
jentame ma troisième année de présidence (depuis 2 ans dune zone comprenant
4 clubs Lions et 100 adhérents). Enfin larrivée dun troisième petit-enfant
a complété les jours déjà bien occupés (2 juste pour cette année 2023, coup de vieux
pour le grand-père que je suis devenu jadore ça, être papi), bref tout ça
organise la vie, travaux dans diverses maisons, (la chambre de la dernière-née en plus)
sans oublier mon propre logement (13 fenêtres changées, même si cest pas moi qui
le fait, il faut être là), trois peupliers de 15mètres étêtés et la haie de thuyas
taillée. A peine eu le temps daller aux champignons et de cueillir mes figues (50
kg tout de même). Cet été prolongé ma heureusement donné la pêche, jai
même pris le temps daller courir le matin plusieurs fois par semaine quand
cétait possible. Donc, il ma fallu choisir : jai délaissé la vie
virtuelle du Web pour cette vie réelle et changeante, passant du coq à lâne,
tentant de surnager et de ne rien oublier.
Certains me disent quil sagit, en fait, que dune vie banale dun
retraité surmené par ses enfants et petits-enfants, sauf que je ne me considère pas
retraité (même si je suis pensionné dOrange), que ma vie familiale nest
quune facette de mes activités associatives, amicales et autres. Et restent aussi
tous les à-côtés de lécrivain que je suis et qui ont tendance à
samplifier (voir en Notes décriture).
(10/11/2023)
La Colombie est le huitième pays sur lequel jaurai posé
le pied en Amérique latine.
Dans les années précédentes, jaurai connu des séjours prolongés comme au
Brésil, au Pérou, en Bolivie ou en Équateur, parfois réduits à quelques jours comme
au Chili ou à quelques heures, comme en Argentine ou au Paraguay. Je connais ainsi assez
bien la partie centrale et lAmazonie, depuis le désert dAtacama et les chutes
dIgaçu. Je ne connais pas le Sud et Ushuaïa se résume pour moi à un flacon de
gel douche.
Reste la Colombie et cest ainsi le Nord que je vais arpenter pendant trois semaines,
depuis lendroit où la Cordillère des Andes se sépare en trois branches qui
forment les épines dorsales du pays, jusquà la Punta Galinas dont la côte au bord
de la mer Caraïbes est la plus septentrionale du continent sud-américain.
Vieux rêve déjà daller visiter ce pays. Ou, du moins, rêve qui sétait
arrêté à la pandémie, au moment où le monde sest arrêté de tourner, six mois
après notre voyage en Équateur en 2019. Depuis plusieurs années, un professeur de
violon colombien sest installé dans notre ville et nous avions eu la joie de
recevoir sa famille chez nous. Autant dire que lidée de partir là-bas nous hantait
depuis longtemps, dautant plus que les globe-trotters que nous croisons, nous
avaient décrit un pays magnifique.
Nous avons commencé notre périple en retrouvant la famille de notre ami colombien à
Bogota, retrouvailles amusantes et loccasion déchanger quelques cadeaux de
part et dautre. Puis, le vrai voyage a commencé dès le lendemain, dune
manière dense. Levés très tôt, parfois avant 6 heures, nous nous écroulions de bonne
heure après des journées marathon, passées à visiter à circuler en bus ou en avion.
Trois semaines à ce rythme, probablement 4000 km parcouru dans ce pays grand comme la
France (le détail est dans un Carnet
de voyage).
Mais le voyage nest rien hormis les rencontres : merci à tous ceux qui nous
permis dapprécier ce voyage, Paola, la championne cycliste, Aurélie, la plus
colombiennes des françaises. Merci à tous ceux qui nous ont ouvert leur communautés,
arhuacos, mizaks, wayus. Gabriel Garcia Marquez conclut Cent ans de solitude par ce
constat : « Le monde aura fini de semmerder le jour où les hommes
voyageront en première classe et la littérature dans le fourgon à bagages ».
jai laissé les livres au fond de mon sac et ma première classe ressemblait à
linconfort des 4X4 au milieu des cahots, mais je ne pouvais rêver mieux.
(23/08/2023)
Jacqueline Teissier-Rimbaud est partie rejoindre Arthur dans les étoiles.
Arrière-petite nièce du poète, son arrière-grand-père était Frédéric, le frère
maudit, celui que Vitalie, la mère de Rimbaud, avait fait effacer avec la complicité de
sa soeur Isabelle sur la photo qui réunissait les deux frangins en costume pour leur
communion solennelle, célébrée le même jour en 1866. Fréderic, cest aussi celui
que le poète jugeait sévèrement lorsquil écrivait à sa famille du fin fond de
lAfrique, le traitant de « parfait idiot ». Son crime ? Avoir
épousé Blanche Justin, une femme « de peu », comme on dit, sans fortune ni
honneur.
Frédéric sest ainsi détourné des siens. Il devenu conducteur de calèches,
camionneur à Attigny (qui sera un jour de 1900, la ville natale de lécrivain
André Dhôtel). Son épouse Blanche lui donnera 3 enfants. Le couple divorce après 10
ans de mariage. Blanche meurt en 1901 à 34 ans, Frédéric en a 13 de plus, il mourra lui
aussi 11 ans après elle des complications dune fracture de la jambe (le point
faible des deux frères
). Émilie, laînée de leurs enfants, deviendra la
grand-mère de Jacqueline.
Cette parenté poussera Jacqueline à sopposer avec fermeté à la panthéonisation
conjointe de Verlaine et Rimbaud : les deux amants se sont quittés de leur vivant, leur
liaison a duré 2 ans, vouloir les réunir dans la mort était une idée stupide,
dautant plus quArthur, le reste de sa vie, na cessé de renier cet
épisode de son adolescence. Et puis, Rimbaud se mérite, Patti Smith la bien
compris : il faut aller débusquer sa tombe au fin fond des Ardennes, errer vers la
ferme de Roche, pas de TGV, dans ce coin qui est une Afrique à elle seule, semblable à
celle du poète, peuplée dindigènes farouches qui célèbrent les sangliers
Jacqueline Teissier-Rimbaud a habité Levallois-Perret, elle espérait revoir bientôt
Charleville-Mézières, sa cité de coeur. Depuis quelques mois, elle sétait
rapprochée de son fils dans les Hautes-Pyrénées. Elle manquera beaucoup à
lassociation des Amis de Rimbaud (qui fêtera ses 100ans en 2029).
Jacqueline y fut secrétaire générale, trésorière, vice-présidente et enfin membre
d'honneur. Elle y uvrait depuis des décennies, elle y était rentrée, poussée par
une autre grande dame, la documentaliste Suzanne Briet.
(07/07/2023)
Je suis plutôt du genre souple avec les critiques. Elles
matteignent rarement. Non que je naie pas dego : japprécie
celles qui sont des louanges, mais celles qui sont moins bonnes me laissent généralement
indifférent, on ne peut pas plaire à tout le monde et je suis plutôt navré quand un
quidam na pas réussi à entrer dans mes pages ou na manifestement pas
adhéré à mon discours.
Dautres en revanche métonnent, elles projettent au-delà de la simple
appréciation un désir, une idée du monde comme on se le représente ou comme on
voudrait quil soit.
La récente expérience cinématographique Lhomme debout ma semblé le
révéler presque au-delà de la caricature : voir en Note décriture, car dans
cette rubrique Étonnements, je me contenterai dévoquer quelques avis sur Ils
désertent, le livre adapté donc. Et ce sera plus particulièrement des avis mitigés
de lecteurs. Ce qui est assez surprenant, cest que ces commentaires (via Babelio) surviennent parfois plusieurs
années après la parution du livre, comme si celui-ci ne tenait pas la distance du temps,
pouvait ainsi être daté. Cest une question importante : peut-être que le
monde économique que jai décrit il y a 12 ans est-il déjà passé de mode ?
Autre surprise : les notes des commentateurs sont parfois sans commune mesure avec
les appréciations. Ainsi, on « ma donné » 2/5 en concluant que «
(je) signe un roman frais qui surprend par son écriture atypique ». Mais
dune manière générale, les avis sont très fouillés, pesant à la fois les
réussites et les défauts et je sais gré à ces lecteurs de pousser lanalyse aussi
loin : certains critiques professionnels nen font pas autant
Bien entendu, je ne commenterai pas ces commentaires, qui ont le mérite dexister,
et cest lessentiel. Lun deux cependant me fascine :
« le goût du VRP pour Rimbaud est une coquetterie de bobo, et l'homosexualité de
la jeune femme une concession à l'air du temps ». Damned
(09/06/2023)
Jai déjà couru 8 fois, si jai bien compté, la
course des 10km proposée par ma ville. La première fois, je navais réussi à
terminer que la première boucle de 3,5 km. Cétait en 2009, je manquais de souffle
et dentrainement. Mais je suis assez fier de moi : qui peut se targuer
davoir commencé une carrière de coureur à pied à plus de 50 ans ? Les
années suivantes, jai pu accomplir la course dans sa totalité, et même progresser
au fil des années jusquen approchant les 50 mn et en y ajoutant dautres
distances, des semi-marathons en moins de 2 heures, les 20km de Bruxelles (arrivé juste
devant le roi de Belgique) ou même 3 fois la course Sedan-Charleville et ses 24 km.
Jai franchi le cap du marathon pour mes 60 ans et lannée suivante, mon seul
exploit a été daccomplir à un train de sénateur la centième édition de
Sedan-Charleville en octobre 2019.
La suite, nous la connaissons : 5 mois plus tard, la pandémie de Coronavirus
sest installée, la vie courante, dans tous les sens du terme, sest arrêtée.
Jai subi comme beaucoup linfection. Cétait au moment où le virus
était le plus virulent et courir est devenu illusoire. Mes entrainements ont diminué de
moitié et sont passés de 800 km à 400 km par an. Les 2 années suivantes nont
guère été propice à la course pour cause de difficultés familiales, il a fallu que je
moccupe de ma mère après le décès de mon père. Tout cela ma usé et
jai accompli moins de 200 km lannée passée.
Cette année, jétais disponible à la date prévue et jai eu envie de renouer
avec la sympathique ambiance de la course de ma ville. Evidemment, mon entrainement était
plus que succinct au moment où je me suis décidé et je navais pas couru une telle
distance depuis plus dun an. En plus, jai pris froid et, si jai réussi
à boucler les 10 km, mon arrivée na pas été glorieuse.
Malgré tout, jai été très heureux de retrouver lambiance de cette course 5
ans après, les encouragements des spectateurs et les premiers qui vous dépassent comme
des balles. Ça ma redonné envie de courir à nouveau, tout en sachant que je ne
retrouverai pas mes performances, lâge est passé par là. Dailleurs (à mon
grand étonnement) je faisais partie des 10 plus vieux à mélancer pour ces 10 km.
Il me semblait quavant (la Covid ?), les vétérans étaient plus
nombreux : souvenir à ma première course dun type de 80 ans qui avait
terminé la course en moins dune heure
Me faudra-t-il bientôt renoncer ? Je persiste à croire que non, je recommence à
éprouver à nouveau des sensations, à retrouver du souffle, voire même à progresser un
peu. 100 km de couru en un mois, pourvu que cela dure
(03/06/2023)
Le Croisic donc, jy suis allé ce week-end pour une
rencontre à la librairie Les Cerfs-Volants et pour fêter les 30 ans du cinéma
associatif Le Hublot : on y projetait en avant-première Lhomme
debout, adapté dIls désertent (voir en Notes décriture). Nous
avons eu la chance dun temps magnifique et le plaisir de parcourir la
presquîle deux jours de suite, en long, large et travers, 24 km de balade à pied
(voir en Webcam).
Le Croisic, je ny ai jamais mis les pieds, ni traversé les marais salants qui
mènent à la presquîle. Je connaissais la Baule, je crois me souvenir y être
allé avec mon père (et ma mère ?), profitant des vacances scolaires dété,
dans les années 60 lorsquil memmenait avec lui « en tournée »
dans son camion Berliet. De la Bretagne, je me souviens des lieux de dépôts de
marchandises : Quimper, Quimperlé, Nantes. Des heures dattente dans la cabine
où je lisais des illustrés tandis que le camion vibrait sous les chocs des meules de
gruyère quon entassait à larrière. Cétait une époque
dépiceries, de magasins de centre-ville où on avait du mal à se faufiler pour y
déposer quelques fromages.
Le Croisic a gardé également cet aspect de gros bourg. Les rues étroites et
pittoresques sont bordées de maisons en granit qui semble indestructibles. Au-delà des
murs des jardins nous parviennent des odeurs de giroflées et darums. Un goéland
passe en riant devant les deux touristes en-dessous qui sextasient sur ce
« luxe, calme et volupté », comme aurait dit Baudelaire.
En lisant la carte, jai retrouvé aussi dautres lieux bretons qui étaient
familiers dans la bouche de mon père : Vannes, Lorient, Brest.
Pornic, au Sud du Croisic, de lautre côté de lestuaire de la Loire est aussi
un nom familier : cest
là que Paul Léautaud passait ses vacances avec sa maîtresse, aimablement nommée
« le fléau ».
(21/04/2023)
Epidendrum jamiesonis : je nai pas eu trop de mal
à identifier cette orchidée, ramassée par inadvertance en Équateur en 2019. Nous étions en randonnée à la lagune de
Cuicocha, cratère du volcan Cotacachi qui culmine à près de 5000 m. Cuicocha est à
3250 m daltitude, un lac a désormais remplacé le cratère effondré. Cest un
endroit somptueux et les sentiers qui en font le tour, serpentent entre les plantes
luxuriantes. Cest ainsi que jai accroché avec mon sac à dos, une tige dépidendrum
jamiesonis, qui pousse là-bas en véritables buissons. Je me suis retrouvé avec deux
petits morceaux dà peine 10 cm pourvu de racines que jai soigneusement
emballés. De retour à la maison, jai retrouvé au fond de mon sac les deux petites
tiges que jai replantées. Avec surprise, jai constaté quelques mois plus
tard que les racines étaient toujours aussi vertes et quune nouvelle pousse
émergeait à la base.
Depuis, la plante na jamais démenti sa vigueur et je me retrouve 3 ans et demi plus
tard avec lorchidée la plus grande de ma collection, dont les tiges, pourvues de
feuilles vernissées, mesurent 90 cm et dont lextrémité florale culmine à plus de
deux mètres de haut au bout dune hampe interminable.
Car elle fleurit ! Et dune si belle manière (voir en Webcam). Ainsi la nature
a retrouvé ses droits à 10 000 km de son lieu habituel.
Mais ce nest pas sans meffrayer un peu : je suis obligé de la rempoter
tous les ans, le petit récipient de 10 cm de diamètre au départ à fait place à un pot
trois fois plus grand et je sens déjà que les racines commencent à y être à
létroit. La plante fabrique une nouvelle pousse chaque année, à chaque fois plus
vigoureuse. Ainsi, ainsi en quinze jours, alors que la floraison est à son apogée,
jai vu émerger du compost une sorte de bambou nouveau qui pousse à vue
dil. A ce train denfer, dans dix ans, la plante devrait devenir quasi
intransportable. Vais-je devoir la sortir à lextérieur au risque de coloniser la
campagne ?
(14/04/2023)
La floraison des orchidées marque le temps de Feuilles de
route. Je ne sais pas pourquoi, jéprouve toujours lirrépressible envie
de la mentionner, de la même manière sans doute que Pierre Bergounioux remarque année
après année léclosion des jonquilles dans ses Carnets de notes. Cette
année, jaurai fait fort : les cymbidiums ci-dessous dans cette même rubrique
et en Webcam le 01/02/2023, maintenant cet article, qui sera suivi très prochainement
dun autre couplet sur une autre floraison dorchidée qui mérite à elle seule
toute une rubrique.
Somme toute, ces considérations végétales narrangent pas ma réputation
décrivain : tout cela fait amateur, on est loin des affres de la création
dont je devrais me faire lécho, avec soupirs et regards tourmentés à la
Baudelaire. On croit donc que ma vie de petit retraité plumitif se résume à regarder
mes fleurs et il est facile docculter le reste. Pourtant, il suffit de lire la
rubrique « Notes décriture » pour connaître les difficultés
artistiques qui massaillent au quotidien (et encore, je ne raconte pas tout, sont
passés sous silence la prévision de 3 ateliers, les entraves administratives, les heures
décriture de J ).
Alors pourquoi revenir sur ces évidences saisonnières ? Probablement parce que
cest justement une manière de sassoir dans une vie qui me laisse peu de
latitude pour le faire. Les échéances défilent, les rendez-vous se programment,
senchainent, associatifs, personnels, familiaux. Jai repris depuis deux ans
mon vieil organiseur de boulot pour moins me perdre, doublé par un calendrier mural et un
agenda numérique partagé avec mes proches pour coordonner tout cela. La nuit remue,
disait Henri Michaux.
Donc la floraison 2023 ? Identique à celle de 2022, avec quelques particularités
cette année, comme la profusion des fleurs de dendrodium qui mont obligé à
étayer les tiges. Ce qui me plait avec les orchidées, ce sont leurs promesses tenues et
gratuites, 3 mois de fleurs magnifiques. Pas besoin de solliciter, de relancer, de
prévenir de léchéance proche, ça arrive comme ça, naturellement, ça change
tellement de nos vies que lon doit bousculer sans cesse pour que les choses
avancent, comme pour L'homme debout en ce moment
(24/03/2023)
Apparitions, disparitions, générations
Il y a une semaine, une disparition a eu lieu, celle de mon oncle, décédé à 89 ans,
et, en même temps, deux apparitions sont venues combler ce vide, celle de la fille de mon
neveu, née le 21 février, ainsi que le premier enfant de mon propre fils, né dimanche
dernier, et jai encore pris un deuxième grade de grand-père.
Cest drôle comme la vie se bouscule parfois : une génération vient en
remplacer une autre.
Soi-même, on reste au milieu, encore vivant, du moins à la une dune librairie
catholique en ligne, comme me lapprend le moteur de recherche Google, qui annonce
aussi le décès de mon oncle : coïncidence
et humour noir
Pour en revenir à mon oncle Konrad, il était mon parrain : « Ainsi à ma
communion, je reçus de mon parrain Konrad, frère de papa, une gourmette à mon prénom,
de mon parrain Michel, frère de maman, un appareil photo Kodak avec un flash cubique
proposant une lampe à usage unique sur chacune de ses faces. » (Yougoslave,
livre sixième, chap. 13).
Michel et Konrad sont désormais tous deux partis. Il reste peu de monde de cette
génération et ceux qui demeurent peuvent à peine se rendre à lenterrement
dun des leurs : un autre oncle subissait une importante opération chirurgicale au
même moment que les obsèques, ma tante Steffy était restée chez elle, ainsi que ma
mère : lâge rend difficile leurs déplacements. Reste la génération
suivante, la mienne et celle de mes cousins et cousines, ça nous rapproche et nous nous
sentons de plus en plus dépositaire de cette mémoire familiale.
Apparitions, disparitions, générations
Cela ressemble à un tour de magie, et là encore, coïncidence : en allant apprendre
à ma mère la naissance de son 3ème arrière petit-fils (que 94 ans séparent),
jai retrouvé une vieille note quelle avait écrite, signifiant que sa propre
mère (ma grand-mère donc) était la descendante dun horloger du roi Louis
XVI
Jai effectué la recherche (vive Internet) et jai remonté toute cette
généalogie qui se révèle exacte : nous descendons en ligne directe par la famille
de ma mère dun certain Jean-Baptiste Godard, qui fût, non seulement horloger du roi, mais
suffisamment proche pour avoir accompagné la famille royale lors de la fuite à Varennes
en 1791. Arrêté puis gracié par Robespierre deux ans plus tard, il sétablit dans
mon petit département et fonde ainsi sa descendance
Mes deux petits-fils, héritiers sans château ni sang bleu, amorcent ainsi la dixième
génération depuis que les horloges de mon ancêtre sonnent lheure.
(02/03/2023)
Avec le début dannée, aussi imperturbable que la semaine
du blanc dans les supermarchés, la floraison des orchidées commence et parmi celles que
je possède, il y a les cymbidiums. Jai lhabitude de placer mes deux plantes
encombrantes (1m de diamètre chacune) dans la petite serre qui jouxte mon bureau. Dès
les premières gelées, début décembre, je les range avec les trois agrumes, et
lensemble ressortira lorsque les risques de fortes gelées seront moins présents.
En effet, les cymbidiums, originaires de lHimalaya, aiment lextérieur et ne
craignent ni la pluie, ni les fortes chaleurs. Ce sont des plantes idéales pour qui
na pas la main verte, il suffit de les placer sous un arbre, à labri du
soleil direct et de sen occuper le moins possible. Les écarts de température et le
grand air sont obligatoires pour provoquer leur floraison. Celle-ci a commencé bien avant
Noël, certains boutons sont encore à éclore et la floraison devrait durer jusquen
avril.
Ce sont des plantes à pseudos bulbes qui forment un renflement à la base de longues
feuilles étroites, vernissées, qui mesurent 70 à 80 cm de long et qui retombent de
manière élégante. Les bulbes trop âgés se racornissent, mais dautres
apparaissent à côté. Mes potées ont maintenant plus de trente ans dâge et la
plus lourde dépasse largement vingt-cinq kilos.
La question de lâge, chez les végétaux, ma toujours fasciné. Les plantes
ne vieillissent pas comme nous, elles sétendent, multiplient, deviennent
encombrantes, et leur floraison nous paraît toujours un signe de jeunesse et de vigueur.
Par exemple, cette année, jai compté à la louche environ 150 fleurs sur une
douzaine de hampes florales. La plus grande tige dépasse 1m20 et compte 28 fleurs. Chaque
fleur mesure 8 cm, autant dire que les inflorescences ne passent pas inaperçues.
Les deux variétés hybrides que je possède sont de couleur jaune, ou plutôt varient
dun blond pâle tirant sur le vert à une teinte poussin qui devient presque
cuivrée lorsque la fleur sapprête à faner. Les sépales et les pétales servent
décrin au labelle délicatement courbé, comme si la fleur tirait la langue.
Dune couleur moins soutenue, presque blanche, le labelle est bordé dun
velours incarnat sur une de mes variétés, et tacheté de points rouges comme le pelage
dune panthère sur lautre. Lopercule, placé au centre de la fleur,
comme Vénus sortant du coquillage de Botticelli, achève dattirer les
insectes : jai dailleurs photographié une petite coccinelle qui
hibernait tranquillement et une minuscule araignée qui jouait à cache-cache avec les
circonvolutions des fleurs.
Car photographier une floraison nest pas si facile. Jutilise un objectif macro
parce que jaime le rendu un peu flou qui dévoile toutes les formes végétales. Et
écrire un tel article sur une plante qui fleurit nest assurément pas aisé non
plus : comment faire passer la beauté de lapparition sans la longueur de la
description, la précision sans la sècheresse dun vocabulaire savant. En fait,
cest presque une note décriture que jaurais dû rédiger.
(01/02/2023)
Je viens de passer quelques jours à Sanary-sur-Mer. Des
circonstances tristes mont fait accomplir les 700 km qui sépare ma ville du Grand
Est des rives de la Méditerranée. Jai accompagné une amie, coiffeuse à domicile,
dont le père venait de mourir. Je le connaissais un peu : nous avions partagé
quelques dîners lorsquil venait voir sa fille dans notre ville. Cétait un
couple très sympathique, et lui, toujours prompt à plaisanter. Nous avons beaucoup ri
ensemble. Et puis, au printemps dernier, lui et sa femme ont quitté leur Picardie natale
pour sétablir à Sanary-sur-Mer. Il avait été autrefois infirmier dans la marine
à Toulon et tous deux espéraient retrouver là-bas les souvenirs de leur jeunesse. Ce
qui ressemblait au vieux rêve des retraités de rejoindre un Sud au climat plus
favorable, sest rapidement compliqué : la maladie la rattrapé, sa fille
na pas eu le temps de le revoir à temps. Je me suis donc retrouvé en touriste
isolé dans un hôtel hors saison pour 3 nuits, balades et course à pied vivifiantes le
long des sentiers côtiers, sans oublier de continuer J, le texte en cours.
Et surtout, jai profité de ce temps libre pour aller voir mon cousin Éric, lequel
habite à 7 km de là. Le hasard nous avait fait nous contacter quelques jours auparavant,
à son initiative : il avait lu Yougoslave, qui est notre roman familial en
commun. Il est même cité dedans. Nous avons ainsi passé 2 soirées à évoquer nos
souvenirs. Lui, de son père (mon oncle donc), décédé un an avant le mien, nous deux
enfin, de nos mères respectives et maintenant nonagénaires. Et puis parler de voyages,
de travail, discuter de tout et de rien.
Parenthèse hivernale donc, étrangement placée sous le signe des papas disparus.
(18/01/2023)
Grâce à mon fichier
Excel dans lequel je note mes exploits sportifs depuis plus de 13 ans,
jeffectue chaque année le bilan de mes courses. Mais entre la progression qui
était encore possible au début de la cinquantaine et lannée présente qui sera
celle de mes 65 printemps, autant dire que ce bilan sapparente à linévitable
vieillissement du corps.
Nul regret cependant, je suis plutôt en forme, mes jambes en béton me portent sans
fatigue et je suis toujours capable de courir 10 km, petitement certes, mais de terminer
plus frais que beaucoup dautres compétiteurs. Lapogée de ma faible carrière
dathlète est déjà ancienne et le marathon que javais osé en 2018 par un
jour de canicule na jamais été conforté (note
d'étonnements du 12/06/2018). Même si jaimerais vraiment courir de nouveau les
20 km de Bruxelles un jour prochain, il me faudrait my prendre plusieurs semaines à
lavance pour mentrainer alors quautrefois jétais capable
denchaîner une telle distance sans préparation particulière (ah, la fois où je
suis arrivé juste devant le Roi Philippe de Belgique
).
Car cette année encore, jaurai peu couru : juste 165 km, ce qui
sapparente à un rythme de jogging dominical. Et encore dans ces parcours, jai
compté les entrainements sur tapis de course (71km), pas si pépères quon pourrait
le penser, le tapis de course ne vous laissant aucun répit, aucun ralentissement possible
tant que vous le laissez programmé à vitesse constante, il faut suivre le rythme, ce qui
nest pas le cas dans la nature. Et puis, vous navez aucune des excuses
habituelles pour vous abstenir de monter sur la machine lorsquil pleut, quil
fait froid
etc. Mes excuses, ou plutôt mes empêchements, cette année auront été
liés à linévitable bousculade du temps et des occupations, travaux à la maison
et autres, bref, on perd lhabitude de chausser les baskets ou les chaussures à doigts ultra légères mais sans
semelles que jutilise toujours (jai accompli le marathon avec !). Cette
année donc, en plus de lallure de course (enfin disons de petit trot), nous aurons
marché aussi 290 km, parfois le dimanche dans notre ville mais aussi au gré des vacances
(30km à Cabourg et quasi 100km sur la côte belge).
Quelques sorties à vélo totalisent 130 km, mais elles ne prennent pas en compte les
trajets quotidiens pour éviter la voiture. Au total il y aura donc eu 600 km
daccompli, à pied où en vélo, sans assistance électrique bien sûr (les
batteries sont une hérésie écologique). Ce nest pas si mal, finalement cette
distance de Paris-Bordeaux à la force des mollets.
(04/01/2023)
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