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Argelès-sur-Mer. La dernière fois que j’y suis allé, j’avais 7 ans, c’était en 1965. Je viens d’y retourner 60 ans après. J’ai reconnu la maison où ma tante Charlotte vivait. J’ai étrangement identifié avec une grande acuité la porte d’une maison voisine où reposait la mère de mon oncle, décédée alors que nous étions là-bas (la mort et tous ses mystères avait dû alors interpeller mon jeune âge). Comble de la délicatesse : le nouveau propriétaire à reproduit sur une plaque émaillée le portrait du cheval préféré de mon oncle, qui fût officier de cavalerie et passionné d’équitation.
Sur la plage à l’extrémité Sud, j’ai également discerné les rochers sur lesquels mes deux cousines posaient à l’époque en naïades adolescentes.
C’est d’ailleurs grâce à l’une d’entre elles que j’ai pu effectuer ce périple.
Le hasard (ou plutôt la littérature) nous a remis en contact après des dizaines d’années d’oubli. Impliquée dans la médiathèque de la ville, une bibliothécaire lui avait présenté Vie prolongée d’Arthur Rimbaud et, bien entendu, le nom de l’auteur lui était familier. Elle m’a ainsi contacté, il y a 4 ans. Mon père, qu’elle connaissait bien et admirait (comme tous ceux qui l’ont approché) venait de décéder quelques mois auparavant. Nous avons alors mis au point un voyage sur nos terres d’enfance commune et je l’avais reçue chez moi. Depuis, nous nous revoyons régulièrement avec grand plaisir. Car le hasard encore (ou peut-être les forces de l’esprit, comme disait Mitterrand) a renforcé et décuplé des retrouvailles : un autre de nos cousins germains, oublié depuis des années, nous recontacte ; un troisième, que nous ne connaissions pas, apparait. Nous nous retrouvons tous à Lyon (note d’Étonnement du 26/01/2024).
Aussi, lorsque j’ai été invité à Bédarieux (voir en Notes d’écriture), pas très loin d’Argelès, j’en ai profité pour aller la voir. Et elle, toujours aussi active et enthousiaste, en a profité pour organiser une rencontre à la fameuse médiathèque de la ville, là où nos retrouvailles avaient eu lieu par livre interposé. J’ai donc rencontré pendant deux heures une trentaine de lecteurs de cette belle cité, avec, au premier rang, ma cousine toute souriante.
Mais le souvenir que je garde, c’est surtout cette promenade effectuée tous les deux jusqu’à une petite chapelle sur les hauteurs de la ville au bout d’un chemin embaumé par les mimosas en fleurs : au moment où nous arrivions à destination, avec la mer en contrebas, notre « nouveau » cousin m’a envoyé un message, comme s’il se doutait de notre périple. Encore un signe du destin probablement. La mémoire des disparus se plait à connecter les enchantements, à raviver un passé et à nous rappeler sa nécessaire transmission.
(17/02/2025)


Lorsque j’ai écrit Dernier travail (Fayard, 2022), l’intrigue de ce roman, qui se déroulait chez Orange, coïncidait avec le premier procès de France Telecom. Tout ce que j’y avais mis à ce sujet était rigoureusement exact : « A la télévision, les journalistes ont indiqué que le jugement serait rendu en décembre. Le vendredi 20 décembre, ajoute-t-il en rangeant son carnet » (Dernier Travail, p. 212 – vous pouvez vérifier). Comme pour Retour aux mots sauvages (Fayard, 2010) écrit au moment de la crise des suicides, j’avais pris grand soin de contrôler la moindre citation, le moindre élément. Cette affaire (comme pour la majorité des salariés qui l’avaient vécu) m’a poursuivi jusqu’à mon départ de la boîte en 2017.
J’ai continué à suivre l’évolution des procès, les tentatives des accusés pour se disculper, pour minimiser leurs responsabilités. Le vendredi 20 décembre 2019, donc, les deux accusés principaux, Didier Lombard, alors PDG à l’époque, et son bras droit, Louis-Pierre Wenès ont écopé d’une peine d’un an d’emprisonnement assorti du sursis et d’une amende de 15 000 euros.
Jugement particulièrement favorable pour ces deux prévenus : cette peine correspond à celle d’un conducteur indélicat qui ne possède pas de permis de conduire et qui refuse « d'obtempérer à une sommation de s'arrêter émanant d'un fonctionnaire ou d'un agent chargé de constater les infractions » (Article L233-1 – pareillement, vous pouvez vérifier).
Comme si ce camouflet c’était pas suffisant pour les familles des 39 victimes identifiées pour les procès, les deux prévenus ont fait appel : un deuxième procès a eu lieu en 2022, en vain pour les accusés, car la Cour d’appel de Paris a confirmé le verdict précédent.
Qu’à cela ne tienne ! Didier Lombard et Louis-Pierre Wenès ont utilisé le dernier recours judiciaire français (tiens, c’est drôle, tous ces recours en série, ils ne paient pas leurs avocats ?) : la Cour de cassation, qui vient de rejeter le 21 janvier dernier les pourvois de l'ex-PDG et de son numéro 2. Ce jugement rend définitive la peine requise au cours des deux procès, mais surtout, elle valide la notion de « harcèlement moral institutionnel ». Cela légitime qu’une machination destinée à la démission en masse puisse naître dans la tête d’esprits machiavéliques, et surtout qu’elle est fortement répréhensible.
Cet arrêt circule pas mal au sein des services juridiques des grandes entreprises, espérons qu’il donnera du plomb dans la cervelle de petits chefaillons arrivés par hasard au pouvoir et attirés par de telles politiques délétères.
(30/01/2025)

 

Je cours à Hawaï, sur l’île de Maui, le long de Wailea Beach.
C’est le milieu de la matinée, les premiers touristes investissent les plages et il y a déjà pas mal de promeneurs le long des passages qui bordent la mer. Il y a pire pour faire un footing : pas de vent, on entend les oiseaux et le roulement des vagues rythme les foulées. Je suis en short et en T-shirt, j’ai commencé doucement. Le chemin est facile, revêtu d’un macadam bien entretenu. On circule entre des haies, parfois sur des pontons de bois qui enjambent un ruisseau.
Je ne tarde pas à croiser d’autres coureurs comme moi. Certains sont torse-nu (gare aux coups de soleil). Je salue la plupart d’un signe de la main, que je double d’un « Hi » que je trouve très américain (la très grande majorité des vacanciers).
A ma droite, le bord de mer est magnifique, les palmiers et les cocotiers apportent juste l’ombre qu’il faut. Les promeneurs s’arrêtent souvent pour admirer la vue, puis repartent à pas lents. L’étroitesse du chemin incite à faire attention.
Parfois, je dois signaler que je m’apprête à les dépasser. Je lance un claironnant « Please sorry for the way » et, une fois que je les ai doublés, je les remercie d’un « Thank you » sonore. A un moment, voyais souvent cette jeune femme, toujours au même endroit, une joggeuse également, qui me faisait un signe de la main avec un éclatant sourire.
Dans ce paysage de rêve, dévolu aux tourisme chic, les hôtels sont nombreux au milieu de parcs à la végétation luxuriante qui débordent jusque sur le chemin. Tout est mis en œuvre pour satisfaire la farniente : un employé traverse devant moi avec une pile de chaises longues.
J’effectue ainsi plusieurs miles (ici, on ne compte pas en kilomètres) avant de faire demi-tour. J’en profite pour ralentir un peu la cadence, je n’ai pas cessé d’accélérer, même si mon allure demeure modeste. J’ai maintenant la mer à ma gauche et toujours le bruit des vagues et le chant des oiseaux. Les promeneurs sont aussi nombreux (« Please sorry for the way – Thank you ! »). A un moment, un jeune père avec une poussette se serre pour me laisser passer (« Good travel with your smiling baby »). Un homme déplace un canoé en travers de la route. Il se dépêche de le redresser à mon approche, mais je le rassure (« No matter »).
Je suis maintenant en sueur. Je tiens mes lunettes d’une main et de l’autre j’essuie mon front. Je ne ralentis pas pour autant la cadence : aujourd’hui je me sens en forme. J’aborde le dernier mile à bonne allure et je termine la dernière lieue à 10 km/h (pardon, 6,2 mph). J’arrive sur la plage, je peux maintenant souffler, les mains sur les hanches. Devant moi, la mer, le sable : quelle belle balade !
Je regarde le compteur : 53 mn et 4 miles 1/3 de parcouru.
Je descends du tapis de course. J’éteins la vidéo sur l’IPad. Dehors il gèle à moins 1.
(21/01/2025)

 

La décision avait été prise en juillet : nous allions passer les fêtes de fin d’année en Guadeloupe, Noël et premier janvier compris. Inutile de préciser que nous avons attendu ce moment avec impatience. La Guadeloupe n’est pas une découverte pour nous, difficile de compter le nombre de voyages effectués là-bas depuis les années 1990. La raison est familiale, changeante également, certains sont revenus en métropole, d’autres ont gardé un pied à terre dans l’île, une nièce a choisi récemment de s’y installer. Autant de raisons pour y aller. Une belle-sœur, originaire de Grande-Terre, mais qui vit en Bretagne, nous accueille dans sa grande maison et ses parents habitent juste à côté. C’est le moment pour elle de faire le tour de ses nombreux frères et sœurs, oncles et tantes, cousins et cousines (elle en dénombre 77, parait-il). Aussi, le séjour aura-t-il été marqué par d’abondantes invitations, chaleureuses et gaies, traditionnelles aussi, avec des « Chanté Nwël », agrémenté de nombreux ti-punch…
La dernière fois que nous avions participé à ces retrouvailles et cette ambiance, c’était il y a sept ans et pareillement pour les fêtes de fin d’année. Nous y étions retournés en novembre 2021, mais juste pour profiter des plages et des randonnées après un automne particulièrement difficile.
Cette année, entre deux visites amicales, nous aurons agrémenté notre séjour de baignades, d’excursions en bateau à Petite-Terre au large de Saint-François et vers la mangrove et les ilets de Sainte-Rose. Evidement, c’est un décor de carte postale et la plongée avec masque et tuba a révélé des tortues marines, des poissons de corail multicolores, un barracuda et d’énormes étoiles de mer. Pourtant, force est de constater que l’océan se dépeuple, les coraux diminuent, les îlets, autrefois munis de cocotiers, se réduisent au point de ne compter plus que quelques buissons chétifs posés sur une minuscule langue de sable. Dans nos premiers voyages, on pouvait apercevoir, sans s’éloigner outre-mesure, des diodons, des murènes, des langoustes sur beaucoup de plages, mais les endroits se sont raréfiés et sont devenus hors d’atteinte. Même Petite-Terre, accessible uniquement par bateau, où nous avions admiré, en 2017, aux abords immédiats, des raies Manta et un énorme requin dormeur, reste désespérément désert, hormis un petit requin citron quasiment apprivoisé qui fait des allers et retours, tout triste d’être ainsi solitaire.
Mes plages préférées restent très touristiques cependant, ce sont celles de Sainte-Anne : Bois-Jolan, un peu reculée pour les amateurs de tranquillité, et celle située en pleine ville, facile d’accès, on y trouve des bokits et des accras pour le repas, des glaces, du monde, mais le délice de s’immerger régulièrement dans l’eau turquoise efface instantanément tous les soucis. C’est là-bas où, 5 heures après la métropole, les pieds dans l’eau, nous avons levé nos coupes de champagne : bonne année 2025 !
(13/01/2025)